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24/12/2011

Pour une confédération européenne

 

Je suis pleinement en phase avec cet article paru sur le le site Polémia. Extraits :

«L’Europe est faite d’Histoire, de sang, de terre et de culture, la réduire à l’Euro ou réduire la construction européenne à la BCE ne peut être un réflexe "patriote". L’eurosceptique radical rejoint en cela, contre toute attente, le marchand mondialisé prétendument euro-fédéraliste.

Ce vieux fantasme d’après-guerre envisageant une union des pays d’Europe à partir d’un marché commun perdure. Etrange monde en effet que celui qui s’évertue à faire passer les fiancés devant le notaire et le banquier avant le maire, le curé ou la chambre à coucher. Mais au-delà des intérêts économiques qui par essence divisent ou renforcent l’individualisme, l’Euro, aujourd’hui dans l’œil du cyclone, peut-être même déjà à terre, prend désormais une valeur hautement symbolique… celle d’un étendard qui pourrait braver les marchés (contre toute attente le dollar ne s’est-il pas déprécié en 2011 par rapport à l’Euro et cela malgré la crise de l’Euroland ?). Un étendard qui fait ressurgir les véritables alliances (lors du dernier sommet européen, Mr Cameron a rejoint tout naturellement le fast-food vermoulu anglo-saxon et sa mafieuse City, sans parvenir à entraîner avec lui ses vieux alliés). Un étendard qui pourrait fédérer et dynamiser à nouveau les pays fondateurs de l’Union potentiellement aux commandes d’un véritable projet européen.

Dans sa dernière livraison du 15 décembre, le LEAP fait montre d’un optimisme surprenant sur la poursuite de l’intégration de l’Euroland et l’accélération de la dislocation anglo-saxonne. On le jugerait volontiers fantaisiste s’il n’avait pas prévu et décortiqué depuis 2006 quasiment au jour près les tsunamis successifs qui se sont abattus sur l’économie mondiale. Il est vrai que l’on a spontanément du mal à détecter un souffle historique dans l’improbable choucroute bling-bling Sarko-Merkel. Pourtant sans le vouloir vraiment et à marche forcée, ces "idiots utiles" fabriquent peut-être à leur insu de l’Histoire. Le LEAP considère que le chemin sur lequel nous sommes est long, complexe et chaotique, mais renforce notre continent et va placer l’Euroland au cœur du monde "d’après la crise".

Faisons en sorte que notre Europe ne soit pas le terrain de jeu de la finance internationale, ni la terre de prédilection d’un certain angélisme. Evacuer l’esprit bourgeois et usurier ne signifie pas pour autant en finir avec l’économie, l’une des trois fonctions vitales et primordiales de notre civilisation. Il nous faudra même nous souvenir qu’à la base de concrétisations politiques d’inspiration confédérale se sont souvent cristallisés des intérêts d’ordre socio-économique.

(...)

Une confédération à la différence d’une fédération, rappelons-le aux eurosceptiques les plus radicaux, est une union d’États indépendants, souverains, mais acceptant de partager sur tous les fronts du vivant une histoire commune en délégant certaines compétences à des organes communs respectueux des identités.

Depuis 1291, nos voisins helvètes partagent un destin commun, se respectent mutuellement entre cantons, politiquement, linguistiquement… Au 13e siècle, des hommes libres des vallées d’Uri, Schwytz et Unterwald trouvèrent leur motivation première à ce pacte d’alliance dans la nécessité "d’aide mutuelle", de protection politique, économique et juridique. La "Landsgemeinde", grande réunion communautaire à vocation sociale et économique, puis progressivement politique illustre remarquablement cette synthèse confédérale qui, au-delà de son creuset identitaire et de ses mythes fondateurs, peut très bien se nourrir de la "nécessité matérielle" pour évoluer vers un projet commun et durable.

Appartenir à sa terre dans une confédération respectueuse des identités ou dépendre d’un système matérialiste à prétention universelle et totalitaire… L’Européen doit choisir. Il y a urgence à ce qu’il trouve, tel Guillaume Tell, une fenêtre de tir pour retrouver le chemin de la puissance et réaliser enfin une Confédération des Euronations. »

Un indispensable complément : ce texte de Marc Rousset.

22/12/2011

Solstice

Helios accompagné des Heures, guidé par Apollon et précédé par l'Aurore
(fresque de Guido Reni, 1614 - Palazzo Pallavicini Rospigliosi, Rome)

 

Joyeux solstice à tous les camarades, connus et inconnus.

Vive la crise.

Vive la révolution.

15/12/2011

Sur George Orwell

Entretien avec Olivier François, journaliste à Eléments et Le spectacle du monde, le 12 décembre 2011 sur Méridien Zéro. Je remercie @Eisbär pour le tuyau.

 

30/11/2011

Mythe fondateur : brandir l'épée

 

 

26/11/2011

Identité et liberté : la Corse, histoire d'une lutte contre l'oppression étrangère

 

Figlioli di stu sole chì piccia le cuscenze
E scrivenu a storia contr'a le preputenze
Fratelli di stu ventu chì porta le sperenze
Di populu Corsu elli so le sustenze


Anu fattu a scelta di campà per dumane
Acelli di a note ch'ùn temenu l'arcane
A l'orlu di a machja quandu s'arrizza mane
Stendi lu so volu versu d'altre muntagne
Sò elli


E si tù è so eiu à porghjelli la manu
E simu centu mila è un populu sanu
Quandu fiurisce a machja à l'entre di lu branu
A custrui l'avvene è suminà la granu


Sò elli è simu noi machjaghjolu è cappiaghju
Fiaccule mai spente da sparghje lu messaghju
In lettere di focu à lu mese di maghju
Quandu a la turchina cumminciò lu viaghju
Sò elli


Senza mai stancià nè mai rifiatà
Cumbattenti d'onore di Santa Libertà
Parechji sò spariti u fior' di l'età
Surghjent'è acque linde di lu fium'unità


Parechji sò spariti à u fior' di l'età
Surghjent'è acque linde di lu fiume'unità

 

Enfants de ce soleil qui embrase les consciences
Et qui écrivent l'Histoire contre les tyrannies
Frères de ce vent qui porte les espoirs
Du peuple corse ils sont le soutien


Ils ont fait le choix de vivre pour un avenir
Oiseaux de nuit qui ne craignent pas l'ombre
Aux abords du maquis quand se lève le matin
Tu étends ton vol vers d'autres montagnes
C'est Eux


Et si toi et moi nous leur tendons la main
Et nous sommes cent mille et un peuple entier
Quand fleurit le maquis au début du printemps
A construire l'avenir et semer le grain


C'est eux et c'est nous, maquisards et braconniers
Flambeau jamais éteint qui étend le message
En lettres de feu au mois de mai
Quand dans le ciel bleu commence le voyage
C'est Eux


Sans jamais se reposer ni jamais reprendre haleine
Combattants d'honneur de la Sainte Liberté
Nombreux ils sont morts à la fleur de l'âge
Sources et eaux pures du fleuve Unité


Nombreux ils sont morts à la fleur de l'âge
Sources et eaux pures du fleuve Unité

 

L'Arcusgi - Sò elli

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

01/11/2011

Rien n'a changé, Jack

La tombe du plus grand écrivain américain de tous les temps, à Glen Ellen, en Californie

 

« Il y a trois classes dans la société. D’abord vient la ploutocratie, composée des riches banquiers, magnats des chemins de fer, directeurs de grandes compagnies et rois des trusts. Puis vient la classe moyenne, la vôtre, messieurs, qui comprend les fermiers, les marchands, les petits industriels et les professions libérales. Enfin, troisième et dernière, vient ma classe à moi, le prolétariat, formée des travailleurs salariés.

« Vous ne pouvez nier que la possession de la richesse est ce qui constitue actuellement le pouvoir essentiel aux États-Unis. Dans quelle proportion cette richesse est-elle possédée par ces trois classes ? Voici les chiffres. La ploutocratie est propriétaire de soixante-sept milliards. Sur le nombre total des personnes exerçant une profession aux États-Unis, seulement 0,9 % appartiennent à la ploutocratie, et cependant la ploutocratie possède 70 % de la richesse totale. La classe moyenne détient vingt-quatre milliards. 29 % des personnes exerçant une profession appartiennent à la classe moyenne, et jouissent de 25% de la richesse totale. Reste le prolétariat. Il dispose de quatre milliards. De toutes les personnes exerçant une profession, 70 % viennent du prolétariat ; et le prolétariat possède 4 % de la richesse totale. De quel côté est le pouvoir, messieurs ?

— D’après vos propres chiffres, nous, les gens de la classe moyenne, nous sommes plus puissants que le travail, remarqua M. Asmunsen.

— Ce n’est pas en nous rappelant notre faiblesse que vous améliorerez la vôtre devant la force de la ploutocratie, riposta Ernest. D’ailleurs, je n’en ai pas fini avec vous. Il y a une force plus grande que la richesse, plus grande en ce sens qu’elle ne peut pas nous être arrachée. Notre force, la force du prolétariat, réside dans nos muscles pour travailler, dans nos mains pour voter, dans nos doigts pour presser une détente. Cette force, on ne peut pas nous en dépouiller. C’est la force primitive, alliée à la vie, supérieure à la richesse, et insaisissable par elle.

« Mais votre force, à vous, est amovible. Elle peut vous être retirée. En ce moment même la ploutocratie est en train de vous la ravir. Elle finira par vous l’enlever tout entière. Et alors, vous cesserez d’être la classe moyenne. Vous descendrez à nous. Vous deviendrez des prolétaires. Et ce qu’il y a de plus fort, c’est que vous ajouterez à notre force. Nous vous accueillerons en frères, et nous combattrons coude à coude pour la cause de l’humanité.

« Le travail, lui, n’a rien de concret qu’on puisse lui prendre. Sa part de la richesse nationale consiste en vêtements et meubles, avec, par-ci par-là, dans des cas très rares, une maison pas trop garnie. Mais vous, vous avez la richesse concrète, vous en avez pour vingt-quatre milliards, et la ploutocratie vous les prendra. Naturellement, il est beaucoup plus vraisemblable que ce sera le prolétariat qui vous les prendra auparavant. Ne voyez-vous pas votre situation, messieurs ? Votre classe moyenne, c’est l’agnelet tremblotant entre le lion et le tigre. Si l’un ne vous a pas, l’autre vous aura. Et si la ploutocratie vous a la première, le prolétariat aura la ploutocratie ensuite ; ce n’est qu’une affaire de temps.

« Et même, votre richesse actuelle ne donne pas la vraie mesure de votre pouvoir. En ce moment, la force de votre richesse n’est qu’une coquille vide. C’est pourquoi vous poussez votre piteux cri de guerre : « Revenons aux méthodes de nos pères ». Vous sentez votre impuissance et le vide de votre coquille. Et je vais vous en montrer la vacuité.

« Quel pouvoir possèdent les fermiers ? Plus de cinquante pour cent sont en servage par leur simple qualité de locataires ou parce qu’ils sont hypothéqués : et tous sont en tutelle par le fait que déjà les trusts possèdent ou gouvernent (ce qui est la même chose, en mieux) tous les moyens de mettre les produits sur le marché, tels qu’appareils frigorifiques ou élévateurs, voies ferrées et lignes de vapeurs. En outre, les trusts dirigent les marchés. Quant au pouvoir politique et gouvernemental des fermiers, je m’en occuperai tout à l’heure en parlant de celui de toute la classe moyenne.

« De jour en jour les trusts pressurent les fermiers comme ils ont étranglé M. Calvin et tous les autres crémiers. Et de jour en jour les marchands sont écrasés de la même façon. Vous souvenez-vous comment, en six mois de temps, le trust du tabac a balayé plus de quatre cents débits de cigares rien que dans la cité de New-York ? Où sont les anciens propriétaires de charbonnages ? Vous savez, sans que j’aie besoin de vous le dire, qu’aujourd’hui le trust des chemins de fer détient ou gouverne la totalité des terrains miniers à anthracite ou à bitume. Le Standard Oil Trust ne possède-t-il pas une vingtaine de lignes maritimes ? Ne gouverne-t-il pas aussi le cuivre, sans parler du trust des hauts fourneaux qu’il a mis sur pied comme petite entreprise secondaire ? Il y a dix mille villes aux États-Unis qui sont éclairées ce soir par des Compagnies dépendant du Standard Oil, et il y en a encore autant où tous les transports électriques, urbains, suburbains ou interurbains sont entre ses mains. Les petits capitalistes jadis intéressés dans ces milliers d’entreprises ont disparu. Vous le savez. C’est la même route que vous êtes en train de suivre.

« Il en est des petits fabricants comme des fermiers ; à tout prendre, les uns et les autres en sont aujourd’hui réduits à la tenure féodale. Et l’on peut en dire autant des professionnels et des artistes : à l’époque actuelle, en tout sauf le nom, ils sont des vilains, tandis que les politiciens sont des valets. Pourquoi vous, monsieur Calvin, passez-vous vos jours et vos nuits à organiser les fermiers, ainsi que le reste de la classe moyenne, en un nouveau parti politique ? Parce que les politiciens des vieux partis ne veulent rien avoir à faire avec vos idées ataviques ; et ils ne le veulent pas parce qu’ils sont ce que j’ai dit, les valets, les serviteurs de la ploutocratie.

« J’ai dit aussi que les professionnels et les artistes étaient les roturiers du régime actuel. Que sont-ils autre chose ? Du premier au dernier, professeurs, prédicateurs, journalistes, ils se maintiennent dans leurs emplois en servant la ploutocratie, et leur service consiste à ne propager que les idées inoffensives ou élogieuses pour les riches. Toutes les fois qu’ils s’avisent de répandre des idées menaçantes pour ceux-ci, ils perdent leur place ; en ce cas, s’ils n’ont rien mis de côté pour les mauvais jours, ils descendent dans le prolétariat, et végètent dans la misère ou deviennent des agitateurs populaires. Et n’oubliez pas que c’est la presse, la chaire de l’Université qui modèlent l’opinion publique, qui donnent la cadence à la marche mentale de la nation. Quant aux artistes, ils servent simplement d’entremetteurs aux goûts plus ou moins ignobles de la ploutocratie.

« Mais, après tout, la richesse ne constitue pas le vrai pouvoir par elle-même ; elle est le moyen d’obtenir le pouvoir, qui est gouvernemental par essence. Qui dirige le gouvernement aujourd’hui ? Est-ce le prolétariat avec ses vingt millions d’êtres engagés dans des occupations multiples ? Vous-même riez à cette idée. Est-ce la classe moyenne, avec ses huit millions de membres exerçant diverses professions ? Pas davantage. Qui donc dirige le gouvernement ? C’est la ploutocratie, avec son chétif quart de million d’individus. Cependant, ce n’est pas même ce quart de million d’hommes qui le dirige réellement, bien qu’il rende des services de garde volontaire. Le cerveau de la ploutocratie, qui dirige le gouvernement, se compose de sept petits et puissants groupes. Et n’oubliez pas qu’aujourd’hui ces groupes agissent à peu près à l’unisson.

« Permettez-moi de vous esquisser la puissance d’un seul de ces groupes, celui des Chemins de Fer. Il emploie quarante mille avocats pour débouter le public devant les tribunaux. Il distribue d’innombrables cartes de circulation gratuite aux juges, aux banquiers, aux directeurs de journaux, aux ministres du culte, aux membres des universités, des législatures d’État et du Congrès. Il entretient de luxueux foyers d’intrigue, des lobbies au chef-lieu de chaque État et dans la capitale ; et dans toutes les grandes et petites villes du pays, il emploie une immense armée d’avocassiers et de politicailleurs dont la tâche est d’assister aux comités électoraux et assemblées de partis, de circonvenir les jurys, de suborner les juges et de travailler de toutes façons pour ses intérêts.

« Messieurs, je n’ai fait qu’ébaucher la puissance de l’un des sept groupes qui constituent le cerveau de la Ploutocratie. Vos vingt-quatre milliards de richesse ne vous donnent pas pour vingt-cinq cents de pouvoir gouvernemental. C’est une coquille vide, et bientôt cette coquille même vous sera enlevée. Aujourd’hui la Ploutocratie a tout le pouvoir entre les mains. C’est elle qui fabrique les lois, car elle possède le Sénat, le Congrès, les Cours et les Législatures d’États. Et ce n’est pas tout. Derrière la loi, il faut une force pour l’exécuter. Aujourd’hui, la ploutocratie fait la loi, et pour l’imposer elle a à sa disposition la police, l’armée, la marine et enfin la milice, c’est-à-dire vous, et moi, et nous tous. »

Jack London, Le Talon de Fer (1908)

28/10/2011

Marre de l'économie ?

 

La crise ? La crise ? Mais c'est toujours la crise ! La vie entière est une crise. C'est « l'inconvénient d'être né ».

Vous en avez assez qu'on ne vous parle plus que de l'explosion prétendument imminente de la « zone euro » (comme si ce n'était pas assez la zone comme ça...) ?

Ça vous fait bâiller que les médias débiles des vendeurs de « temps de cerveau disponible » n'aient plus à la bouche que les montants astronomiques de la dette grecque, les plans de sauvetage, les écart de taux des obligations soi-disant « souveraines » et la valse du CAC 40, quand ils n'en pipaient mot à l'époque, pas si lointaine, où vous, vous connaissiez déjà tout ça par coeur  ?

Parce qu'en plus, ces clowns, bien dressés à coups de pubs Coca Connard, ils oublient toujours l'éléphant au milieu du couloir : vous savez, les grands patrons de New York et de la City, les mafiosi, les dealers de billets verts tout frais sortis de la planche à imprimer et de CDS adossés à l'air du temps, c'est-à-dire au vide sidéral d'une production si délocalisée qu'elle est partie en voyage sur le Styx...

Ils ne disent pas le quart de la vérité et cette vérité est si déformée, si commanditée, que leur matraquage racoleur finira par abrutir jusqu'au plus dopé des traders (vous me direz, on n'abrutit pas les abrutis...).

Dans ce brouhaha incantatoire de banquiers interlopes, de politicards demi-mondains et de vraies putes journalistiques, on finirait presque par se demander ce qui peut bien nous rester, à nous les proscrits, les interdits de parole, les pestiférés « fâââchistes », à part sortir le flingue virtuel de nos piaffantes velléités révolutionnaires et défourailler dans le gras de tous ces histrions communicants pour leur apprendre à fermer leurs mouilles.

Eh ben, mes camarades, c'est comme la pluie. On attend un peu, et le soleil reparaît. Toujours. Bon, perso j'aime la pluie, donc ce n'est pas une image idéale, mais pourtant c'est aussi simple que ça.

Donc, on attend. De préférence, comme c'est l'automne, au coin du feu, tous instruments d'abrutissement médiatique éteints ou lancés à les écrabouiller, depuis belle lurette, dans le conteneur à ordures dont ils n'auraient jamais dû sortir, et on se prélasse un peu. Avec une jolie femme ou, faute de grive, avec une tablette de chocolat noir aux noisettes et une bonne bouteille de Corbières. Et des bouquins. Et même de la musique.

Bah oui, l'action, ce n'est pas toujours de se remuer. Ce qui manque aujourd'hui, c'est plus souvent la réflexion (sans parler de la pensée), la tranquillité, la sensualité, et le silence. Et pourtant, on dit « se cultiver » et moi, ça m'évoque davantage les labours, l'odeur de la terre et de la sueur, l'effort du paysan et du petit hobereau sur les paysages français, que le smokinge à l'opéra ou les tortillages de cul aux vernissages d'art contemporain...

A propos, un bon feu, c'est facile à faire. Une jolie femme, des tablettes de chocolat et des bouteilles de Corbières, c'est facile à trouver et ça ne coûte pas cher (enfin, sauf la jolie femme bien sûr). Et des bons bouquins, d'hier et d'aujourd'hui, vous n'aurez pas assez de toute votre vie pour en lire.

Pour ma part, je préfère la compagnie d'Ernst Von Salomon à celle de Jacques Attali, celle de Dominique Venner à celle de Marc Fiorentino et celle de Jure Georges Vujic à celle de Herman Van Rompuy.

Vous pouvez aussi écouter ça, par exemple, c'est tellement équilibré que ça vaut presque le silence :


 

Aaaaahhh... Ça va déjà mieux, non ?

18/10/2011

Fleur d'Ecosse, contre l'ennemi anglais

Le 17 mars 1990, une fière équipe d'Ecosse de rugby à quinze remportait le Tournoi des Cinq Nations et, par la même occasion, le grand chelem, en battant (13 à 7) les arrogants Anglais qui, comme à la bataille de Bannockburn les 23 et 24 juin 1314, étaient venus persuadés de leur supériorité.

Ce 17 mars 1990, à Edimbourg, tout un stade chanta le Flower of Scotland, référence explicite à cette victoire historique. Ce chant est officieusement devenu l'hymne national écossais, après des générations d'humiliants God save the king (ou the queen).

Il n'a toujours pas accédé au statut d'hymne officiel, mais quelque chose me dit que cela pourrait bientôt changer... A bas l'Angleterre coloniale ! End London rule !

 

 

 

O Flower of Scotland
When will we see
Your like again,
That fought and died for
Your wee bit hill and glen,
And stood against him, (England!)
Proud Edward's Army
And sent him homeward
Tae think again.

The hills are bare now
And autumn leaves lie thick and still
O'er land that is lost now,
Which those so dearly held,
That stood against him
Proud Edward's Army
And sent him homeward
Tae think again.

Those days are past now
And in the past they must remain
But we can still rise now,
And be the Nation again
That stood against him (England!)
Proud Edward's army
And sent him homeward
Tae think again.

O Flower of Scotland
When will we see
Your like again,
That fought and died for
Your wee bit hill and glen,
And stood against him,
Proud Edward's Army
And sent him homeward
Tae think again.

 

Ô Fleur d'Écosse
Quand reverrons-nous
Les hommes dignes
Qui se sont battus et sont morts pour
Tes minuscules collines et vallées,
Et se sont dressés contre lui,
Le fier Edouard et son armée
Et l'ont renvoyé chez lui
Pour qu'il y réfléchisse à deux fois.

Les collines sont désertes à présent
Et les feuilles d'automne épaisses et silencieuses
Recouvrent notre pays qui est désormais perdu,
Si chèrement défendu par ces hommes,
Ceux qui se sont dressés contre lui
L'armée du fier Edouard
Et l'ont renvoyé chez lui
Pour qu'il y réfléchisse à deux fois.

Désormais, ces temps sont du passé
Et dans le passé ils doivent demeurer
Mais nous pouvons encore nous lever
Et redevenir la Nation
Qui s'est dressée contre lui,
L'armée du fier Edouard
Et l'ont renvoyé chez lui
Pour qu'il y réfléchisse à deux fois.

Ô Fleur d'Écosse
Quand reverrons-nous
Les hommes dignes
Qui se sont battus et sont morts pour
Tes minuscules collines et vallées
Et se sont dressés contre lui,
Le fier Edouard et son armée
Et l'ont renvoyé chez lui
Pour qu'il y réfléchisse à deux fois.

 

16/10/2011

« Le système de l’argent périra par l’argent »

 

« (...) Les excès du prêt à intérêt étaient condamnés à Rome, ainsi qu’en témoigne Caton selon qui, si l’on considère que les voleurs d’objets sacrés méritent une double peine, les usuriers en méritent une quadruple. Aristote, dans sa condamnation de la chrématistique, est plus radical encore. "L’art d’acquérir la richesse", écrit-il, "est de deux espèces : l’une est sa forme mercantile et l’autre une dépendance de l’économie domestique ; cette dernière forme est nécessaire et louable, tandis que l’autre repose sur l’échéance et donne prise à de justes critiques, car elle n’a rien de naturel […] Dans ces conditions, ce qu’on déteste avec le plus de raison, c’est la pratique du prêt à intérêt parce que le gain qu’on en retire provient de la monnaie elle-même et ne répond plus à la fin qui a présidé à sa création. Car la monnaie a été inventée en vue de l’échange, tandis que l’intérêt multiplie la quantité de monnaie elle-même […] L’intérêt est une monnaie née d’une monnaie. Par conséquent, cette façon de gagner de l’argent est de toutes la plus contraire à la nature" (Politique).

Le mot "intérêt" désigne le revenu de l’argent (foenus ou usura en latin, tókos en grec). Il se rapporte à la façon dont l’argent "fait des petits". Dès le haut Moyen Age, l’Eglise reprend à son compte la distinction qu’avait faite le droit romain pour le prêt de biens mobiliers : il y a des choses qui se consument par l’usage et des choses qui ne se consument pas, qu’on appelle commodatum. Exiger un paiement pour le commodat est contraire au bien commun, car l’argent est un bien qui ne se consume pas. Le prêt à intérêt sera condamné par le concile de Nicée sur la base des "Ecritures" – bien que la Bible ne le condamne précisément pas ! Au XIIe siècle, l’Eglise reprend à son compte la condamnation aristotélicienne de la chrématistique. Thomas d’Aquin condamne également le prêt à intérêt, avec quelques réserves mineures, au motif que "le temps n’appartient qu’à Dieu". L’islam, plus sévère encore, ne fait même pas de distinction entre l’intérêt et l’usure.

La pratique du prêt à intérêt s’est pourtant développée progressivement, en liaison avec la montée de la classe bourgeoise et l’expansion des valeurs marchandes dont elle a fait l’instrument de son pouvoir. A partir du XVe siècle, les banques, les compagnies de commerce, puis les manufactures, peuvent rémunérer des fonds empruntés, sur dérogation du roi. Un tournant essentiel correspond à l’apparition du protestantisme, et plus précisément du calvinisme. Jean Calvin est le premier théologien à accepter la pratique du prêt à intérêt, qui se répand alors par le biais des réseaux bancaires. Avec la Révolution française, le prêt à intérêt devient entièrement libre, tandis que de nouvelles banques apparaissent en grand nombre, dotées de fonds considérables provenant surtout de la spéculation sur les biens nationaux. Le capitalisme prend alors son essor.

A l’origine, l’usure désigne simplement l’intérêt, indépendamment de son taux. Aujourd’hui, on appelle "usure" l’intérêt d’un montant abusif attribué à un prêt. Mais l’usure est aussi le procédé qui permet d’emprisonner l’emprunteur dans une dette qu’il ne peut plus rembourser, et à s’emparer des biens qui lui appartiennent, mais qu’il a accepté de donner en garantie. C’est très exactement ce que nous voyons se passer aujourd’hui à l’échelle planétaire.

Le crédit permet de consommer l’avenir dès le moment présent. Il repose sur l’utilisation d’une somme virtuelle que l’on actualise en lui attribuant un prix, l’intérêt. Sa généralisation fait perdre de vue le principe élémentaire selon lequel on doit limiter ses dépenses au niveau de ses ressources, car on ne peut perpétuellement vivre au-dessus de ses moyens. L’essor du capitalisme financier a favorisé cette pratique : certains jours, les marchés échangent l’équivalent de dix fois le PIB mondial [là, Alain de Benoist, auteur de l'article, se trompe, mais peu importe car il a raison sur le principe], ce qui montre l’ampleur de la déconnexion avec l’économie réelle. Lorsque le système de crédit devient une pièce centrale du dispositif du Capital, on rentre dans un cercle vicieux, l’arrêt du crédit risquant de se traduire par un effondrement généralisé du système bancaire. C’est en brandissant la menace d’un tel chaos que les banques ont réussi à se faire constamment aider des Etats.

La généralisation de l’accession au crédit, qui implique celle du prêt à intérêt, a été l’un des outils privilégiés de l’expansion du capitalisme et de la mise en place de la société de consommation après la guerre. En s’endettant massivement, les ménages européens et américains ont incontestablement contribué, entre 1948 et 1973, à la prospérité de l’époque des "Trente Glorieuses". Les choses ont changé lorsque le crédit hypothécaire a pris le dessus sur les autres formes de crédit. "Le mécanisme de recours à une hypothèque comme gage réel des emprunts représente infiniment plus", rappelle Jean-Luc Gréau, "qu’une technique commode de garantie des sommes prêtées, car il bouleverse le cadre logique d’attribution, d’évaluation et de détention des crédits accordés […] Le risque mesuré cède la place à un pari que l’on prend sur la faculté que l’on aura, en cas de défaillance du débiteur, de faire jouer l’hypothèque et de saisir le bien pour le revendre à des conditions acceptables". C’est cette manipulation d’hypothèques transformées en actifs financiers, jointe à la multiplication des défauts de paiement d’emprunteurs incapables de rembourser leurs dettes, qui a abouti à la crise de l’automne 2008. On voit l’opération se répéter aujourd’hui, aux dépens des Etats souverains, avec la crise de la dette publique.

C’est donc bien au grand retour du système de l’usure que nous sommes en train d’assister. Ce que Keynes appelait un "régime de créanciers" correspond à la définition moderne de l’usure. Les procédés usuraires se retrouvent dans la manière dont les marchés financiers et les banques peuvent faire main basse sur les actifs réels des Etats endettés, en s’emparant de leurs avoirs au titre des intérêts d’une dette dont le principal constitue une montagne d’argent virtuel qui ne pourra jamais être remboursé. Actionnaires et créanciers sont les Shylock de notre temps.

Mais il en est de l’endettement comme de la croissance matérielle : ni l’un ni l’autre ne peuvent se prolonger à l’infini. "L’Europe commise à la finance", écrit Frédéric Lordon, "est sur le point de périr par la finance". C’est ce que nous avons écrit nous-mêmes depuis longtemps : le système de l’argent périra par l’argent. »

Source : Métapo infos

Aymeric Chauprade : « Chronique du choc des civilisations »

Aymeric Chauprade sur Radio Courtoisie, le 24 août 2011, dans le Libre Journal d'Emmanuel Ratier.