03/10/2010
Battons-nous, ou mourons comme des lâches
Trois films, trois exemples à suivre - quant à leur esprit viril uniquement, puisque l'attaque frontale en terrain découvert serait, de nos jours, aussi suicidaire que stupide et ne fait plus fantasmer que les romantiques au petit pied et les frustrés en mal de défoulement.
D'abord, vive l'Ecosse.
Tirée du film de Mel Gibson, "Braveheart" (1995), la harangue de William Wallace avant la bataille de Stirling (11 septembre 1297), prélude à l'indépendance du pays arrachée à l'ennemi anglais (1328) :
Voilà des mots qui devraient nous toucher particulièrement.
Non seulement parce que les Ecossais sont nos amis, au moins depuis l'Auld Alliance, non seulement à cause de l'exécration que tout bon Français voue à l'Angleterre, et pas uniquement à cause de Jeanne d'Arc ; mais surtout en raison de notre situation de peuple soumis à l'Occident anglo-américain, avec ses pseudo-valeurs et son matérialisme répugnant ; de peuple soumis à l'hyperclasse transnationale issue de cet Occident, et envahi tant par ses produits marchands et sous-culturels que par une immigration de peuplement qui lui sert d'outil de contrôle social.
Comme pour les Ecossais en 1297, ce qui est en jeu pour nous, c'est notre survie et notre liberté en tant que peuple.
Nous ne ferons pas l'économie du combat, et pas seulement derrière un écran d'ordinateur.
*
Ensuite, à bas l'Anglosphère et ces rats de Yankees.
En VO (mais c'est sans importance), extraite du film éponyme de Kevin Kostner (1990), la scène de la libération de "Danse avec les loups", ex John Dunbar, devenu un vrai Sioux Lakota :
... John Dunbar, devenu un vrai Sioux Lakota, puisqu'il est impossible pour "un véritable être humain" (dixit "Oiseau bondissant", le shaman du film) d'avoir quoi que ce soit en commun avec la civilisation des "tuniques bleues", mélange de mercantilisme bien-pensant et d'hystérie vétérotestamentaire assassine.
Car, comme le disaient les généraux Sherman : "Nous devons agir avec une sérieuse détermination contre les Sioux, même jusqu'à leur extermination, hommes, femmes et enfants. (...) Au cours d'un assaut, (...) les soldats ne peuvent s'arrêter pour distinguer entre hommes et femmes, ou même faire une discrimination entre les âges" et Sheridan : "Les seuls bons Indiens que j’aie jamais vus étaient morts".
Alors qu'au contraire, la noblesse est du côté indien.
N'en déplaise aux américanolâtres et aux esprits binaires obsédés par la seule couleur de peau, je trouve jouissif de voir, dans cette scène de bataille, des Sioux sans la moindre arme à feu massacrer des dégénérés surarmés, avec la participation de leur frère blanc qui n'a en rien renié, lui, les qualités de tout homme digne de ce nom.
*
Et enfin, via le rêve d'un monde ressemblant peut-être à notre lointain passé, mais qui est en même temps une allégorie de notre époque, voici une guerre entre l'idéal de nous-mêmes et tout ce qui est sot, agressif et laid.
Aragorn, "Grand-Pas", le héros de Tolkien, fait son véritable retour dans ce troisième volet de la trilogie cinématographique du "Seigneur des anneaux" ("Le retour du roi", 2003), et sera couronné après la défaite du Big Brother de l'histoire, Sauron, "l'oeil qui voit tout" et envoie ses contrefaçons d'humains, les Orques, tenter de conquérir un monde qu'il jalouse et convoite pour une simple et bonne raison : il n'y aura jamais part ; ce qu'il essaie d'en faire est impossible ; le monde des hommes n'est pas pour les monstres et le pouvoir n'y est que transitoire.
Finalement, c'est peut-être à cela que se résume notre destin : vaincre les monstres issus de l'achèvement d'un cycle de civilisation, pour restaurer la sagesse, la force et la beauté, ces trois piliers du temple de notre âme et de notre identité que, pour l'anecdote, la franc-maçonnerie spéculative, cette contrefactrice des arcanes antiques, a repris à son compte dans l'inversion ambiguë de toutes les valeurs.
Une belle scène de bataille, en tout cas, qui voit l'arrivée des cavaliers du royaume du Rohan, au secours de Minas Tirith, la capitale assiégée du Gondor :
La suite (non montrée ici) comporte une lutte victorieuse contre des ennemis venus du sud, montés sur des Oliphants, sortes d'éléphants géants, transparente allusion à la bataille de Zama qui, en 202 avant JC, illustra le triomphe de l'intelligence romaine sur la force carthaginoise.
Qui n'a rếvé de combattre aux côtés d'Aragorn, de se battre pour sa liberté et celle de ses semblables ?
Au lieu de crever dans son lit, comme un bourgeois pétochard essayant juste de conserver son confort, dût-il abdiquer toute dignité ; comme Harpagon protégeant sa cassette.
Alors, battons-nous.
Peut-être pas joliment, comme dans ces films qui ne sont que des évocations.
Mais courageusement, intelligemment et sans trêve.
Soyons rusés et déterminés.
Soyons solidaires, pensons collectif.
Vive la crise.
Vive la révolution.
00:36 Écrit par Boreas dans Cinéma, Histoire, Politique | Lien permanent | Tags : mel gibson, william wallace, braveheart, ecosse, sioux, indiens, kevin kostner, danse avec les loups, tolkien, bataille de zama | Facebook | | Imprimer | |
20/09/2010
L'après-démocratie
L'excellent Scriptoblog a cette qualité rare de ne pas dépendre de l'actualité pour manifester ses talents, ce qui lui permet de publier la recension d'un bouquin paru il y a neuf ans et de faire ainsi découvrir un auteur suisse méconnu : Eric Werner.
Le tout, en un article où je retrouve tellement mes propres idées que j'ai presque l'impression de l'avoir écrit moi-même (j'ai juste ajouté quelques liens).
« L’Après-démocratie » est un recueil de textes, dans lequel Eric Werner (EW) défend la thèse générale suivante : plus personne ne peut décemment croire que nous vivions en démocratie. Il ne reste, du projet démocratique, que des traces – telles que les élections, tous les cinq ans, et qui consistent désormais à choisir entre l’aile gauche et l’aile droite d’un seul et même parti institutionnel.
Aile gauche et aile droite qui, au demeurant, font en pratique à peu près la même politique, imposée par « le vrai pouvoir ».
Un vrai pouvoir qui se situe au niveau de l’hyperclasse, et de son gouvernement mondial. Un vrai pouvoir qui échappe à tout contrôle démocratique, influence de manière décisive la « ligne éditoriale » de la presse, et pilote à distance la plupart des institutions, justice incluse, via des réseaux d’influence ramifiés. Ce vrai pouvoir décide de ce que vous ignorez, donc de ce que vous savez. Il vous éduque, il vous surveille, il vous juge. Il contrôle la démocratie, elle ne le contrôle pas.
Nous voici dans « l’après démocratie ».
*
Comment en est-on arrivé là ?
Fondamentalement, pour EW, il s’agit tout simplement de la mise à jour de ce que la « démocratie occidentale » était de manière latente – mise à jour rendue possible par la disparition de l’ennemi.
Une disparition de l’ennemi qui a levé les barrières que le système était obligé d’entretenir devant lui, pour échapper à son cours spontané…
Depuis que le communisme a été vaincu, l’Occident n’a plus besoin d’entretenir une façade pluraliste. Il s’engage donc dans la voie totalitaire, qu’il a longtemps combattue, mais qui est aussi, secrètement, son essence profonde.
Chronologiquement, l’adoption de la loi Gayssot arrive juste après la chute du Mur de Berlin : le totalitarisme occidental a littéralement éclaté au grand jour, dès que son adversaire ne fut plus là pour l’empêcher de s’exprimer.
Totalitarisme d’ailleurs d’autant plus redoutable que, fait observer EW, il est dissimulé par un formidable voile propagandiste de dénégation, bien plus habile que celui tendu jadis par les systèmes hitlériens ou staliniens.
EW nous renseigne, à ce propos, sur ce qui se produit en ce moment dans le monde germanophone (EW est suisse) – une évolution d’un monde voisin dont nous sommes, nous, en France, sans doute assez mal informés.
Un chiffre : en Allemagne, le nombre de personnes ayant fait l’objet de procédures pour « connections avec des groupes extrémistes » et « excitation du peuple » se montait, en 1998, à 9.549. En Suisse, deux juges ont été mis en vacances forcées après avoir prononcé une peine jugée trop légère contre un politicien d’extrême droite coupable d’un délit d’opinion. L’affaire fut rejugée, et le politicien a été condamné à 15 mois de prison ferme – pour comprendre l’échelle des peines sous-jacentes à cette décision, notons qu’à la même époque, l’auteur d’un viol sur une fillette de cinq ans fut condamné à une peine de neuf mois de prison avec sursis. Le monde germanophone est majoritairement en train, tout doucement, de basculer dans un totalitarisme ouvert, une répression judiciaire de la pensée dissidente – bien plus vite, bien plus nettement qu’en France.
*
Après avoir planté le décor, EW analyse cette dérive totalitaire.
Reprenant la distinction d’Arendt entre pensée et raisonnement, il montre que l’Occident contemporain est peuplé d’idéologues des Droits de l’homme qui raisonnent, mais ne pensent plus – en ce sens que leur raisonnement ne se réfère plus à la réalité. Cette disposition d’esprit particulière se combine avec des intérêts objectifs (toujours implicites) pour créer une ambiance générale d’intimidation. De là, vers la terreur, qui est désormais repositionnée dans le cadre général de l’insécurité – on ne terrorise plus en brutalisant, mais en exposant à une brutalité latente (économique, sociale, voire physique, avec une délinquance tolérée). Sous l’angle organisationnel, il n’y a évidemment aucun rapport entre l’arrestation par le NKVD au petit matin dans l’URSS des années 30 et l’agression au coin de la rue dans la France de 2010 ; mais sur le plan fonctionnel, le rôle de la terreur dans une mécanique d’intimidation générale et de sidération populaire est comparable. Le « racaille » raciste antiblanc est le SA du totalitarisme multiculturel américanomorphe (un point sur lequel EW revient fréquemment).
Plus profondément, une guerre cognitive est faite aux populations, par des moyens plus subtils que ceux dont disposaient les anciens totalitarismes. La dissolution du « nous » (famille, coutume, tradition, enracinement local et national) rend le « je » impensable (puisqu’il n’est plus inscrit dans rien, il « flotte »), et l’opinion bascule dans la formulation moue d’un consensus auquel « on » se rallie (« on » étant, finalement, un corps collectif « non-social », la somme des individualités disjointes reliées uniquement par le réseau médiatique). Il y a explosion des frontières de l’être mental des Occidentaux, ce sont des organismes sans peau, en voie de dilution, « clients » parfaits du néo-totalitarisme occidental. L’ultime rempart contre l’illusion, l’école, est même désormais tombé, avec la généralisation du « pédagogisme », c'est-à-dire la manipulation des enfants pour leur faire intérioriser des attitudes bien précises, compatibles avec le système dominant.
Au-delà de ce constat somme toute aujourd’hui presque devenu banal, EW tente de mettre en lumière les causalités profondes du mécanisme décrit. Il s’intéresse, par exemple, à la sociologie de cette nouvelle domination, et souligne le rôle particulier qu’y tient manifestement la pègre – historiquement très souvent associée aux régimes totalitaires ou dictatoriaux. Les tyrans, rappelle EW, se méfient toujours beaucoup plus des honnêtes gens que des voyous, chez qui ils vont souvent recruter leur garde personnelle.
D’où une hypothèse sur la convergence spontanée entre l’idéologie de certains sociologues de l’excuse (« pro-racailles ») et le totalitarisme des marchés : version renouvelée du mécanisme décrit par La Boétie et d’autres, mécanisme qui voulait que le tyran, pour garder sous contrôle les « abeilles domestiques », importât des « frelons étrangers ».
Dans cette optique, l’incubation d’une idéologie de la haine de soi n’est, en réalité, qu’un dispositif annexe ; le but est de tenir les « abeilles » dans la peur des « frelons ». Ce n’est ni plus ni moins que la généralisation des techniques utilisées, pendant la période de dénazification de l’Allemagne, par les conquérants américains (destruction programmée du modèle anthropologique germanique, supposé créateur de la « personnalité autoritaire » de type « fasciste » - d’où la fabrication d’une population féminisée, fragilisée, en quête de protection et donc facile à dominer).
D’où, encore, une hypothèse sur l’attitude différenciée des idéologues néo-totalitaires à l’égard du religieux. D’une manière générale, ils s’en méfient, puisque la religion définit un espace mental collectif structuré, donc de nature à s’opposer aux forces de dilution que le néo-totalitarisme instrumentalise. Mais ils se méfient du christianisme plus que des autres religions (islam en particulier), parce que le christianisme construit une métaphysique de la liberté, où la conscience individuelle peut en quelque sorte être équipée de manière autonome – ce qui implique que même si les forces de dilution détruisent toute structure collective, le christianisme peut continuer à structurer une révolte individuelle (chose que l’islam peut plus difficilement faire). D’où sans doute le fait que nos dirigeants combattent l’islam là où il est structurant d’une identité collective réelle (donc en Dar-al-Islam), mais en encourage l’importation chez nous, où il contribue à la déchristianisation.
*
Comment résister à ce néo-totalitarisme ? Voilà, évidemment, la question qu’EW ne peut éviter ; à quoi bon décrire l’ennemi, si ce n’est pas pour le combattre ?
EW souligne tout d’abord qu’il faut combattre en nous la tendance au défaitisme. Quand nous apprenons que 5 % des Suisses n’ont pas la télévision, ne nous lamentons pas qu’ils ne soient que 5 % ; prenons note du fait qu’ils sont déjà 5 %.
Ensuite et surtout, il faut, nous dit-il, sortir du piège consistant à reconnaître au pouvoir actuel un monopole de la capacité à gérer les problèmes qu’il a lui-même créés (l’immigration inassimilable, par exemple). Il faut poser le problème en termes renouvelés, et cesser de confondre révolte et résistance.
Le révolté et le résistant disent « non », l’un et l’autre. Mais pas de la même manière. Le révolté, c’est l’esclave fouetté qui, soudain, se retourne et fait face à son maître. Le résistant, lui, ne fait pas face : il s’efface, il sort du cadre de gestion construit par son maître.
C’est pourquoi le résistant est avant tout un adepte de la stratégie indirecte ; à l’opposé du révolté, qui cherche la confrontation directe avec le tyran à l’intérieur d’un contexte donné, le résistant pense l’action dans la durée, et cette action n’est pas nécessairement un affrontement avec le tyran – c’est avant tout un effort pour se préparer à la modification du contexte.
Le plus souvent, cette modification du contexte est obtenue tout simplement en durant : le résistant gagne tant qu’il ne perd pas, c'est-à-dire tant qu’il n’est pas anéanti. Et finalement, le résistant l’emporte s’il parvient à faire durer sa retraite flexible une seconde de plus que l’élan du pouvoir qui tentait de l’anéantir. Ensuite, une fois que le pouvoir s’est usé, qu’il a fabriqué lui-même la masse de contradictions internes qu’il ne peut plus gérer, alors la résistance peut passer à la contre-offensive.
Et donc, pour conclure, ce que sous-entend EW, c’est qu’il ne faut pas accepter la logique selon laquelle nous devrions tolérer le système parce qu’il est le seul à pouvoir gérer les problèmes qu’il a créés. Nous devons lui résister, pour être là quand il ne pourra plus gérer ces problèmes.
14:14 Écrit par Boreas dans Politique, Société | Lien permanent | Tags : eric werner, démocratie, totalitarisme, hyperclasse, occident, loi gayssot, terreur, immigration, servitude, révolte, résistance | Facebook | | Imprimer | |
19/09/2010
Electroencéphalogramme plat
La plupart des gens ne pensent pas.
Quand je dis : "la plupart", j'estime la proportion de ces anencéphales virtuels à environ 95% de la population.
Et quand je dis : "ne pensent pas", je dois généralement préciser : "par eux-mêmes", justement parce que l'auditeur... ne pense pas. En effet, comment prétendre penser, s'il s'agit juste de régurgitation d'un conditionnement par autrui ?
Bref, ils ne pensent pas.
Néanmoins, ils croient penser, bien sûr.
D'ailleurs, quand je dis qu'ils ne pensent pas, cela ne choque personne. Aucune manifestation de susceptibilité, parce que l'auditeur croit qu'il n'est pas concerné. Mais aussi parce qu'il s'en fout, de penser.
Pour lui, ce n'est pas une valeur.
Ce qui se passe, c'est que les gens ne sont pas là pour penser, mais juste pour engouffrer.
Engouffrer deux douzaines de concepts basiques que leurs parents, le système scolaire, les médias, l'entreprise qui les emploie, leur conjoint, leur déversent dans ce qui leur sert de système d'orientation au sein de la société, et puis c'est marre.
Après, dans n'importe quelle situation, suffit de remuer tout ça, comme dans un shaker - "agitez bien !" -, et la réponse juste, l'attitude juste, c'est à dire adaptée au grand foutage de gueule général, sort comme d'un distributeur automatique, rétribuée en intégration collective, en gratifications sociales variées, en grégarisme renforcé.
Le prêt-à-penser, c'est ça. Et vous pouvez l'appliquer à quasiment toutes les situations, ça marche.
Engouffrer, ce n'est donc pas tout, puisqu'il y a aussi régurgiter, pour obtenir autre chose à engouffrer.
Mais tout de même, engouffrer, c'est le principal, pour l'Homo festivus.
Parce que le but de la vie de ces 95 % de non-pensants, consiste essentiellement à jouir et donc, à capter, acquérir, prendre, dérober, voler, garder, conserver, thésauriser, consommer, posséder, manger, ingérer, absorber, se goinfrer, profiter, savourer, se délecter, se goberger ; bref, à s'en foutre plein la poire, à s'en faire péter la sous-ventrière, à être un imbécile heureux de son indigestion.
Oui, parce qu'à la fin :
"Il n’y a que le ver pour faire aussi bonne chère qu’un empereur. Nous engraissons toutes les autres créatures pour nous engraisser, et nous nous engraissons nous-mêmes pour les asticots... Roi bien gras et mendiant maigre, cela ne fait qu’un menu varié – deux plats, mais pour une seule table. Tout finit par là."
(William Shakespeare, Hamlet - Acte IV, scène III)
Or doncques, vous qui pensez ou tentez au moins de le faire, sachez qu'il est inutile de discuter littérature, philosophie, poésie, arts en général, ou d'un quelconque sujet intelligent, avec l'immense majorité des braves gens qui vous entourent.
Ils n'y entravent que dalle, ils n'en pipent pas une broque, ils sont bouchés à l'émeri, ils ont la cervelle barrée.
Mais surtout, gardez bien ça en tête, ils s'en tamponnent le coquillard, ils s'en balancent, ils s'en battent l'oeil avec une queue de sardine, ils s'en soucient comme d'une guigne.
Et pourquoi ?
Simplement parce que penser, d'abord ils n'ont aucune, mais alors absolument aucune idée de ce que ça peut bien vouloir dire, et ensuite et principalement, à leurs yeux, ça ne rapporte rien, que des ennuis.
Eux, leur truc, c'est tout ce que j'ai déjà dit (en engouffrer un max, etc.).
Ça peut aller de se taper un bon gueuleton à s'acheter fort cher une voiture moche et inutile, de débiner un collègue pour prendre sa place à pleurer de joie au mariage d'un rejeton, de regarder le dernier épisode de "Plus belle la vie" à se payer le dernier smartphone (je mets le lien Wikipédia, parce que les gens intelligents savent rarement ce que c'est, alors que les cons, toujours)...
Il y a une infinité de choses que ces gens-là aiment et veulent.
Le tout premier indice de ce qu'on est peut-être en train de commencer à penser, c'est de s'apercevoir qu'on n'aime ni ne veut quasiment rien de ce que eux, ils aiment et veulent.
Là commencent les emmerdements, parce que sortir du prêt-à-penser, du mode festivus festivus, du processus binaire bien-mal noir-blanc juste-injuste, de la tétralogie conjoint-bagnole-maison-enfants qui débouche sur l'idéal : "Une vie réussie"... c'est le plus grand sacrilège qui soit, le plus grand blasphème contre la religion jouisseuse des anencéphales et des gastéropodes à visage humain.
Le sens, plutôt que le profit ; le fond, plutôt que la forme ; la vérité, plutôt que le plaisir ; la connaissance, plutôt que le savoir ; voilà des aspirations que les déficitaires du bulbe, les bas du front, les étroits du bonnet et les nécessiteux du neurone ne vous pardonneront pas.
Non pas parce qu'ils seront jaloux de votre intelligence pour elle-même (bien qu'ils sentent parfois confusément que ça leur manque), mais parce qu'ils croiront que vous détenez quelque chose qui pourrait leur profiter ; pour briller en société, ou lever davantage de poules, ou monter des combines lucratives, par exemple.
Donc, ils vous créeront des emmerdes, pour voir s'ils ne pourraient pas vous prendre quelque chose ou, au moins, se prouver que, finalement, vous n'êtes que de la daube.
Par conséquent, si vous voulez vivre tranquille, passez plutôt pour un inoffensif original, pour un savant cosinus, pour un gentil fada.
Et puis, comme disait Courteline, "Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet."
Il aurait pu ajouter que, de toute façon, on n'a pas vraiment le choix.
C'est ça, ou rejoindre le troupeau, ce qui est impossible.
Apprendre à penser, c'est un voyage sans retour.
23:02 Écrit par Boreas dans Culture, Société | Lien permanent | Tags : jouir, penser, engouffrer, prêt-à-penser, homo festivus, philippe muray, georges courteline, william shakespeare, majorité, intelligence, expérience de milgram | Facebook | | Imprimer | |
10/09/2010
Maintenant
Maintenant
Les âmes mortes ne me pèsent plus
Les phrases creuses ne me blessent plus
Les regards mornes ne m'étonnent plus
Les charmes vides ne m'attirent plus
Maintenant
Que le jour et la nuit ne guerroient plus
Que la perte et le gain n'ont plus de sens
Que la mort est soeur de la naissance
Que l'existence ne m'importe plus
Maintenant
Quoique n'étant rien je suis aussi tout
De mes yeux ouverts sort le monde entier
Autour de mon axe tourne la roue
Et même brisé mon coeur est léger
20:54 Écrit par Boreas dans Philosophie, Poésie | Lien permanent | Tags : maintenant | Facebook | | Imprimer | |
05/09/2010
"Plus humain que l'humain, telle est notre devise"
"Blade Runner", de Ridley Scott, 1982
Un chef-d'oeuvre visuel, doublé d'une réflexion sur la nature humaine.
Vidéo 1 : une bande-annonce qui n'en est pas une
Vidéo 2 : la meilleure scène de ce film-culte, en VF, dans la version "director's cut" de 1992
Vidéo 3 : pour les passionnés, la même scène plus complète, en VO, dans la version "final cut" de 2007 (observez bien, là où s'envole la colombe, une différence, esthétiquement très importante)
Vidéo 4 : le générique et le début du film, version initiale et "director's cut". A couper le souffle.
Vidéo 5 : le générique, version "final cut", qui confirme les intentions du réalisateur.
19:28 Écrit par Boreas dans Cinéma, Culture, Philosophie, Poésie, Société | Lien permanent | Tags : ridley scott, philip k. dick, blade runner, vangelis | Facebook | | Imprimer | |
04/09/2010
Pourquoi nous vivons...
...Ou plutôt, pourquoi ce que nous croyons être, feint de le savoir.
J'entends déjà les décérébrés : "Pouah, quelle priiise de têêête !"
Comme quoi, ce sont bien ceux qui en ont le moins (de tête) qui en parlent le plus.
Dans l'Antiquité - vous savez, cette époque d'heroic fantasy où des mecs coiffés de casques à cimier trucidaient des hydres, et autres balivernes, pour on ne sait plus quelles raisons - ; dans l'Antiquité, au fronton des temples grecs, on pouvait lire :
"Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux".
Dépassé, ça. Aujourd'hui, on se connaît, non ? Y a des psy pour aider, d'ailleurs.
Et, pour ce qui est de l'univers, des astronomes et même des astrophysiciens. C'est vous dire si on connaît.
Mais quant aux dieux... Faut arrêter, hein, c'est pour les enfants, ça.
Non, sérieux. Parole d'élites et d'Education Nationale (et pas de ce farceur d'André Prévot qui osait dire que "l'instruction consiste à faire d'un imbécile ignorant un imbécile instruit").
Vraiment, ça ne sert à rien, A NOTRE EPOQUE, on vous dit, EN 2010 ! De se poser des questions.
Des questions, non mais on vous demande un peu...
On sait tout, aujourd'hui ; d'ailleurs, la Terre est devenue toute petite, avec le progrès, la science et tout le bazar. A preuve, on en fait le tour en moins de temps qu'il n'en fallait à nos bouseux d'arrière-grands-parents pour aller de Montauban à Pithiviers.
Et on sait tout sur tout le monde. Par exemple, tenez, les Tibétains qui sont opprimés par les Chinois, on sait qu'ils vivent en altitude (sacrément haut, même), qu'ils sont bouddhistes, qu'ils s'habillent drôlement, y a qu'à voir le Dalaï Lama, et une foule d'autres choses. Vous croyez qu'on savait tout ça, dans le passé ? Que mamie Joséphine et papy Victurnien étaient au courant de tout ça ? Qu'ils avaient connaissance des galaxies et des supernovae ?
Nan, dans le temps, on vivait ignare et crasseux, comme des ploucs, dans un espace confiné, au milieu de superstitions invraisemblables, à cause de la trouille qu'on avait de tout ce qu'on ne savait pas. Histoires de sorts et de sorciers, de maléfices et de malédictions, loups-garous, clouage de chauves-souris aux portes des granges, etc. Beurk.
Et on arquait tout ce qu'on pouvait, juste pour pouvoir bouffer, esclavagé qu'on était par quelques richards à particule qui se prélassaient dans des châteaux et dilapidaient du pognon qu'ils ne gagnaient pas. Pour se consoler, on était obligé de se plier à tout un tas de bondieuseries.
Alors qu'aujourd'hui, libéralisme politique et économique, mâtinés de "modèle social", de culture et de technologie, se mettent en quatre pour nous apporter LE CONFORT et LE BONHEUR.
Symboliquement, nous sommes en pleine lumière, sacrebleu !
Des néons partout. Luna Park. La Voie Lactée. A se pâmer dans les éblouissements stroboscopiques. Orgasme du savoir et de l'intelligence.
Notamment, aux rayons cosmétiques et électroménager de votre supermarché préféré.
Là où, entre deux transhumances compulsives, le bétail pseudo-instruit et réputé pensant s'agglutine en ectoplasmes indistincts, pour copuler communier dans l'adoration de rassurants substituts d'âme.
Eclairé, notre monde l'est tellement que vous ne pouvez même pas regarder par terre sans qu'un vendeur surgi de nulle part ne vous propose un devis pour faire goudronner l'allée de votre supposé jardin, avec un financement sur trois ans à taux imbattable.
Savant, notre monde vous prouve sa maîtrise infinie de tout et de n'importe quoi, le soir à la télé, en vous décrivant finement la flore, la faune et les moeurs des habitants du Sulawesi occidental, après douze pubs pour du dentifrice et des téléphones et avant une émission de téléréalité permettant d'approfondir la psychologie des cons.
Aseptisé, notre monde l'est assez pour offrir à chacun une place pleinement désinfectée, récurée, nickel, pour une personnalité débarrassée de toute filiation, une place au soleil de ses fausses valeurs, dans l'enfer de ses besoins artificiels, toujours recréés, jamais satisfaits.
Dans cette haute civilisation, nous sommes là pour être renseignés, de manière à nous conduire toujours en consommateurs avisés et responsables et ainsi, participer pleinement à l'élévation globale du niveau de l'humanité (occidentale) - "Ouais, pasque si t'as pas de thune, mon pote, tu peux toujours aller t'élever ailleurs", me souffle un passant qui souhaite conserver l'anonymat.
Ainsi édifiés, fort logiquement puisque la raison nous gouverne, par cette incomparable et bienfaisante omniscience, que faisons-nous ?
Bah, nous achetons, bien sûr.
Et pas que des fringues et des bagnoles et des jeux vidéo et du soda et des voyages et des détergents et de la bouffe industrielle et d...
Non. Aussi de quoi tenir debout dans notre miroir et ne pas trop crever de trouille.
De quoi éviter que la baudruche et le gaz inconnu qui la gonfle, ce que nous appelons "moi" sans même nous être demandé ce qui nous a conditionnés à nous donner ce nom, ni moins encore si une telle identification se justifie ; de quoi éviter, donc, que notre image de nous-mêmes ne se volatilise.
De quoi échapper à la terreur, la vraie, celle qui pointe devant ce que nous savons pertinemment, au fond, être bien pire encore que l'ignorance de notre vraie nature : LA CONNAISSANCE DU NEANT DE CE QUE NOUS CROYONS ETRE. De ce néant tel qu'il est, peut-être, ou du moins, tel que notre matérialisme nous l'enseigne à chaque instant.
Alors, avoir pour être, nous achetons aussi la croyance à notre réalité et à notre importance.
Oh, pas principalement dans les supermarchés... Là, avec notre barbaque fouaillée par la pétoche, nous traînons notre vile hypocrisie, notre sale mauvaise foi, comme partout mais juste, en plus, avec le sentiment bien enfoui, généralement inconscient, d'aller au Temple de notre vraie religion, pour y faire des emplettes qui nous distrairont de notre angoisse.
Non, c'est partout et tout le temps, par tous les moyens, que nous achetons de quoi fuir et nous étourdir. Posséder, être possédé. Nous le vendons d'ailleurs aussi aux autres, tellement nous y croyons, tellement nous voulons y croire, tellement la Camarde nous guette et tellement nous n'avons aucune foi ni aucun feu, tellement nous sommes déjà morts.
En vérité, si nous sommes quelque chose, nous sommes l'incarnation de la lâcheté. Ou du sommeil profond.
C'est pourquoi, il faut d'abord nous réveiller.
Ou plutôt, nous éveiller, parce que nous réveiller signifierait que nous n'avons pas toujours dormi et cela, nous n'en savons rien.
"Dès que leurs visages furent tournés vers le dehors, les hommes devinrent incapables de se voir eux-mêmes, et c'est notre grande infirmité. Ne pouvant nous voir, nous nous imaginons. Et chacun, se rêvant soi-même et rêvant les autres, reste seul derrière son visage. Pour se voir, il faut d'abord être vu, se voir vu. Or, il y a sûrement une possibilité pour l'homme de réapprendre à se voir, de se refaire un oeil intérieur. Mais le plus grave, et le plus étrange, c'est que nous avons peur, une peur panique, non pas tellement de nous voir nous-mêmes que d'être vus par nous-mêmes ; telle est notre absurdité fondamentale. Quelle est la cause de cette grande peur ? C'est peut-être le souvenir de la terrible opération chirurgicale que nos ancêtres ont subie quand ils furent coupés en deux ; mais alors, ce que nous devrions craindre le plus, c'est qu'en continuant à nous séparer de nous-mêmes par une brillante fantasmagorie, nous allions nous exposer à être encore une fois coupés en deux - et c'est ce qui arrive déjà. Si nous avons peur de nous voir, c'est bien parce qu'alors nous ne verrions pas grand-chose ; notre fantôme a peur d'être démasqué.
C'est par peur de cette horrible révélation que nous nous grimons et que nous grimaçons. Et notre tête, modeleuse de masques et conteuse d'histoires, au lieu de nous guider vers la vérité, est devenue notre machine à nous mentir." (René Daumal)
Si ce blog s'appelle "Vers la Révolution", ce n'est pas seulement parce que le théâtre d'ombres où nous errons en nous imaginant y jouer un rôle et y avoir des ennemis extérieurs à vaincre, donne une pièce dont nous sommes les héros (les zéros ?) et où une nouvelle élite doit remplacer les destructeurs du Beau, du Bon et du Vrai.
C'est, en premier lieu, pour la raison que cette pièce nécessite que la Révolution intervienne d'abord en chacun de ces héros.
Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse d'un bouleversement complet, immédiat et renversant.
Comme l'a dit Maître Eckhart :
"Dehors, il y a le vieil homme, l’homme terrestre, la personne extérieure, l’ennemi, le serviteur. A l’intérieur de nous tous, il y a l’autre personne, l’homme intérieur, que les Ecritures appellent l’homme nouveau , l’homme céleste, la personne jeune, l’ami, l’aristocrate."
Devenons d'abord un peu l'ami de cet ami.
Cessons de fuir, d'acheter tout ce qu'on nous vend et qu'en réalité, nous nous vendons à nous-mêmes, sous prétexte du monde alentour, pour nous distraire de l'ici et du maintenant.
Tournons-nous vers le grand livre de la nature, où tout est dit, y compris ce que nous sommes et deviendrons. Et paradoxalement, pour devenir "l'homme nouveau", inspirons-nous de notre Histoire et de nos traditions.
Un simple pas dans la bonne direction, et nous pourrions découvrir une étrange aptitude du changement intérieur à modifier l'apparence de toutes choses "extérieures". De subie, la pièce de théâtre pourrait devenir jouée.
Il n'y a pas de petit pas. Même le premier, qui seul coûterait, paraît-il.
Loin d'être facile ou romantique, cette simple réorientation demande, certes, un effort largement au-delà des capacités de la plupart des homoncules qui rampent sur la pente de leur prétendue existence.
Mais ce travail de toute une vie, n'est-il pas le seul qui vaille de vivre ?
De toute façon, ce n'est jamais la foule qui fait la Révolution, mais toujours et uniquement une élite.
Ça a déjà commencé.
En fait, c'est le jeu éternel. Ici et maintenant.
En route.
Victoire
03:11 Écrit par Boreas dans Crise, Culture, Economie, Histoire, Philosophie, Société | Lien permanent | Tags : élite, savoir, passé, propagande, consumérisme, peur, éveil, gustav meyrink, louis cattiaux, rené daumal, maitre eckhart, nisargadatta maharaj, civilisation | Facebook | | Imprimer | |
23/08/2010
La tenaille
"La démocratie se confond exactement, pour moi, avec la souveraineté nationale. La démocratie, c'est le gouvernement du peuple par le peuple et la souveraineté nationale, c'est le peuple exerçant sa souveraineté sans entrave."
Charles de Gaulle, conférence de presse du 27 mai 1942
"S'il y a quelqu'un ici qui doute encore de ce que l'Amérique soit l'endroit où tout est possible, qui se demande si le rêve de nos Pères fondateurs est encore vivant, qui s'interroge sur le pouvoir de notre démocratie, ce soir vous lui avez répondu."
Barack Hussein Obama, discours du 04 novembre 2008
Comment se fait-il que l'immense majorité des populations occidentales croie vivre en démocratie ?
Comment est-il possible que, scrutin après scrutin, l'électeur revote pour ceux qu'il avait écartés lors d'une précédente élection, au profit d'autres tout aussi peu fiables ?
Comment en arrive-t-on à une pareille stabilité du régime, à une semblable pérennité d'une forme de gouvernement et surtout, à une telle continuité dans l'alternance des gouvernants ?
Questions, certes, d'une insigne banalité, et dont l'importance est généralement écartée par les esprits forts en se référant au fameux mot de Churchill ("La démocratie est le pire des systèmes, à l'exclusion de tous les autres") et par le populaire en citant Coluche, après Jean-Louis Barrault ("La dictature, c'est 'ferme ta gueule' ; la démocratie, c'est 'cause toujours'") .
Dame, c'est pas terrible, mais y a pas mieux, on vous dit. C'est tout simple, non ?
Admettons.
Par conséquent, nécessairement, presque tout le monde reconnaît que ce qui est censé être le pouvoir du peuple n'est, en réalité, que la captation de ses voix (enfin, de celles du nombre sans cesse décroissant des électeurs qui croient encore suffisamment à ce système pour se rendre aux urnes, là où ils n'y sont pas obligés par la loi, comme en Belqique).
Captation, comme l'a dit Noam Chomsky, par la propagande ("La propagande est aux démocraties ce que la violence est aux dictatures") ou fabrication du consentement.
Et pourtant, presque tout le monde s'en fout.
Vous ne me croyez pas ?
Allez donc admirer l'ardeur de la transhumance quotidienne vers les centres commerciaux...
Comme l'écrivait Jack London, "J'aspire à l'avènement d'une époque où l'homme réalisera des progrès d'une plus grande valeur et plus élevés que son ventre, où il y aura pour pousser les hommes à l'action un stimulant plus noble que le stimulant actuel, qui est celui de leur estomac." (Ce que la vie signifie pour moi, 1905).
Le même Jack London qui, l'année de sa mort, faisait dire à un de ses personnages : "La plupart des hommes sont des imbéciles, et c'est la raison pour laquelle il faut se préoccuper des rares hommes qui sont sages" (Les Ossements de Kahekili, 1916).
Rien de nouveau sous le soleil.
Sauf que le gouvernement des imbéciles par d'autres, tout aussi imbéciles mais plus rusés, pourrait bien échoir bientôt aux "rares hommes qui sont sages"... Faute de sous pour acheter la paix civile, faute d'idées pour remplacer les sous. Mais n'anticipons pas.
Le premier principe d'un système de domination accepté de bon gré par les dominés, c'est de revêtir une apparence innocente. En d'autres termes, d'être invisible ou, au moins, de passer inaperçu.
En matière politique et donc, également, économique (car si, dans le passé, l'économie a toujours été subordonnée au politique, de nos jours, elle se confond avec lui au point qu'on parle de "gérer" un pays...), il s'agit, en pratique, de transposer au réel un principe ternaire.
C'est la bonne vieille dialectique (souvent considérée, à tort, comme hégélienne), la trinité "thèse-antithèse-synthèse", détournée par nos modernes satrapes, qu'ils soient marxistes ou libéraux.
Le principe en est simple et déclinable à l'infini, suivant les orientations propagandiques de chaque composante du système de domination et à tous les étages de celui-ci.
Par exemple, il a été résumé par François-Bernard Huyghe, en ce qui concerne les néo-conservateurs nord-américains, comme étant "un usage sans complexe de la force au service d’un usage moral du pouvoir".
Autrement dit, "l'Occident est pacifique et bon et doit être préservé" (thèse), "l'Irak est mauvais car il soutient Al Qaïda qui attaque l'Occident" (antithèse), "donc nous devons taper sur l'Irak même si nous sommes pacifiques" (synthèse).
Cette dialectique est utilisée pour convaincre un maximum de gens, et ça marche (si vous en rigolez rétrospectivement, rappelez-vous quand même le nombre d'Américains, et même d'Européens, convaincus par les diatribes relatives à "l'Axe du Mal" et aux "armes de destruction massive").
L'outil est articulé, avec le soutien des médias, pour disqualifier tout contradicteur.
Comment, vous ne croyez pas que l'Occident soit intrinsèquement bon ? C'est donc que vous êtes un soutien aux fondamentalistes musulmans, ou au moins un idiot utile !
Comment, vous ne croyez pas que l'Irak soutienne Al Qaïda et possède des armes de destruction massive ? Vous n'avez pas vu ce qu'ILS ont fait au World Trade Center ? C'est donc que vous êtes un naïf, ou un sans coeur !
Comment, vous ne croyez pas qu'il faille taper sur l'Irak ? C'est donc que vous avez l'ensemble des deux défauts précédents !
Bref, vous êtes prié de croire que c'est nous les bons et eux, les méchants.
Si vous dites "menteurs", vous êtes un con et un salaud.
CQFD.
En fait, c'est encore beaucoup plus rusé que ça.
En tant que Français, vous vous êtes dit, en voyant Villepin à l'ONU, s'opposer à une intervention militaire en Irak : "Ah, le brave homme !" ou, au moins : "Ouf, en France au moins, nous ne tombons pas dans l'excès bushiste !"
Que nenni. Poudre de perlimpinpin.
Pensez-vous vraiment que ce bon Galouzeau, apparemment intègre et droit puisque s'opposant à la saloperie bushienne, se souciait réellement de l'Irak ?
Et à supposer qu'il s'en fût soucié, que sa bravade onusienne mettait en cause, en quoi que ce soit, non seulement, concrètement, le principe même de l'attaque mais, surtout, l'adhésion de Villepin au système de domination et à son fonctionnement ?
Un indice : ce personnage est un copain d'Azouz Begag, sympathique allogène, ancien ministre, qui vient de rejoindre son très désintéressé mouvement République Solidaire et avait déclaré, en 2005 : "il faut traverser le périphérique, aller chez les indigènes là-bas, les descendants de Vercingétorix... Il faut casser les portes et, si elles ne veulent pas s'ouvrir, il faut y aller aux forceps. Partout où la diversité n’existe pas, ça doit être comme une invasion de criquets, dans les concours de la fonction publique, dans la police nationale… Partout, de manière à ce qu’on ne puisse plus revenir en arrière".
Passons.
Il faut bien comprendre qu'une telle collusion n'est pas isolée.
Bien au contraire, elle est emblématique.
Emblématique aussi, et bien davantage encore, le financement de la Révolution russe et de l'URSS par la haute finance et les grandes entreprises occidentales.
Tout autant que les fondamentaux consanguins du gauchisme et du libéralisme économique.
Non moins que le prétendu clivage entre "droite" et "gauche", dont l'effacement ridiculise l'obstination avec laquelle l'establishment essaie encore de faire croire au droitisme des libéraux, comme au souci du peuple de la gauche internationaliste.
Le libre-échangisme international provoque-t-il des délocalisations, des fermetures d'entreprises, des baisses de salaires ? Le volet social et public du "libéralisme" est là pour prendre en charge les chômeurs et les accompagner dans leur déchéance, en collectivisant donc les pertes dues à l'initiative privée.
La bureaucratie nationale ou européenne freine-t-elle le développement des multinationales ? Le volet libéral du "socialisme" se fait un devoir de pousser à la roue de l'immigration, en finançant celle-ci avec l'argent des travailleurs-contribuables, qui subissent ainsi une seconde pression déflationniste sur leurs salaires.
La "gauche" accusera la "droite" d'horreurs concurrentielles et libérales, sans toutefois s'attaquer à son internationalisme destructeur des peuples et de leur prospérité, contribuant ainsi aux profits du capital.
La "droite" taxera la "gauche" d'infâmies bureaucratiques et collectivistes, sans s'en prendre au financement public des conséquences du libre-échange, puisque l'idéologie qui motive les aides publiques sert les intérêts marchands.
Et pour cause, puisque "droite" et "gauche" sont en toc.
Car, comme l'illustre la fabrication, par l'Angsoc, du faux ennemi Goldstein, dans "1984" d'Orwell, la dialectique du système de domination emploie des adversaires qui n'en sont pas.
Libéralisme et collectivisme, droite et gauche, toujours les deux mâchoires de la même tenaille.
Tentez d'éviter l'un et vous aurez l'autre. A tour de rôle.
De toute manière, on ne vous proposera jamais que l'un ou l'autre.
Voire, un repoussoir (les "extrêmes") censé incarner la dictature, mais qui n'a pas la moindre chance d'hériter du pouvoir.
L'oligarchie cosmopolite qui a confisqué celui-ci, n'entend pas laisser quiconque sortir de son système.
Ses armes, les seules : l'argent et la connerie de la foule. Les deux lui sont indispensables.
Il est illusoire d'espérer voir diminuer la connerie, mais quant à l'argent...
00:34 Écrit par Boreas dans Economie, Histoire, Politique, Société | Lien permanent | Tags : démocratie, élections, dialectique, dictature, noam chomsky, propagande, jack london, système, george orwell, de gaulle, françois-bernard huyghe, azouz begag, villepin | Facebook | | Imprimer | |
13/08/2010
Avant la tempête
Ouh la la, le titre... Ouh la la, la photo...
Ça commence mal.
C'est qu'il ne faut pas, paraît-il, effrayer l'investisseur, le rentier, la ménagère de moins de cinquante ans, les agences de marketing, les Bisounours adeptes du vivre-ensemble, le ban et l'arrière-ban de la bien-pensance autosatisfaite.
Imaginez : vous êtes sur une plage, au mois d'août, à vous dorer la pilule en étudiant malgré vous l'anatomie de cette fraction séduisante de la gent féminine qui vous empêche de lire tranquillement le dernier Marc Lévy.
Soudain, se fait entendre une voix grave au micro des Maîtres Nageurs Sauveteurs : "Votre attention, s'il vous plaît. Une lame de fond née d'un séisme sous-marin se dirige vers la côte. Veuillez vous éloigner immédiatement de la plage."
Affolement général. Hurlements. On détale. La gracieuse gent féminine fait preuve d'un style de course douteux mais d'une vitesse insoupçonnée, des parents apeurés appellent anxieusement leurs enfants égaillés, vous-même vous dressez d'un bond pour ramasser précipitamment vos affaires, vous trébuchez dans le sable mou...
Merde alors !
Non non, pas possible, nous vivons dans une société de précaution, de prévention, d'hyperprudence... "Fumer tue". "Pour votre sécurité, contrôles automatiques". "Apprenez-lui le caniveau". "Méfiez-vous des idées qui puent."
Ça ne peut pas être vrai. Enfin si, mais ça ne peut pas être aussi grave.
Allez, vous reculez d'une petite dizaine de mètres, vous gagnez un ou deux mètres d'altitude, ça suffira. Et puis, le spectacle d'un petit raz-de-marée, ici... Mmmhhh, un spectacle gratuit, c'est excitant... S'passe jamais rien, alors...
Et là, vous entendez un grondement du côté de l'océan. Ça monte, ça enfle. Comme le bruit d'un train qui approche.
Et puis... vous la voyez. Elle se lève, haute comme... comme un immeuble de dix étages.
Oups.
Depuis le 15 septembre 2008, vous connaissez l'existence d'une "crise financière" mondiale. Même la télé en a parlé, c'est dire si c'est vrai.
Mais c'est fini. Enfin, de toute façon, elle était seulement "financière", la crise, elle ne concernait que de l'argent invisible, des chiffres de banquiers, alors vous ne l'avez pas sentie. Elle ne vous a pas empêché d'acheter une Mégane neuve en profitant de la prime à la casse, ni de partir en vacances.
Au boulot, vous aviez bien perçu comme une petite crispation, entre le Responsable Commercial qui a piqué sa... crise, sur les objectifs non atteints - mais bon, comme chaque année, hein -, et la Direction qui a ferraillé avec les Syndicats refusant un gel des salaires.
Mais c'est la reprise, maintenant, pas vrai ? Tout le monde le dit, à commencer par le gouvernement, l'OCDE, le FMI...
La Chine et sa croissance à deux chiffres... Les Etats-Unis repartent et annoncent le redécollage des économies occidentales... La crise grecque, terminée ; l'Europe a joué son rôle.
"Tout-va-bien", répétez après moi...
Eh bien, désolé, mais non.
Les économistes Bac + 12 qui n'avaient rien vu venir, même encore le 14 septembre 2008, sont les mêmes que ceux qui, aujourd'hui, vous prédisent cette sacro-sainte reprise.
Les politiciens et les médias qui vous serinaient, il y a deux ans, leur douce berceuse hédoniste, européiste, obamaniaque, orientée "vivre-ensemble", "développement durable" et "soft power", font aujourd'hui comme s'ils s'étaient faits bisser par un public aux anges.
Alors que rien n'est réglé et qu'au contraire, la situation, non seulement financière mais économique, réelle, s'est aggravée. Dette partout, chômage exponentiel, jeunesse désabusée, délocalisations...
Ce ne serait rien, ou presque, si ce problème était le seul.
Rêvons un peu.
Si un quart de notre population n'était d'origine extra-européenne et très majoritairement inassimilable, si nos "élites" n'étaient un tas de cons et de salauds de déconnectés du réel, si la pseudo-Education Nationale n'avait jeté l'instruction publique à la poubelle, si la religion officielle du pékin moyen n'était la déambulation extasiée dans les galeries commerciales, si...
Nous pourrions régler très facilement la question des finances et de l'économie. Reprendre rapidement une existence tranquille et saine, consacrée à "sculpter [notre] propre statue" (Plotin), dans la culture et la pérennité de nos traditions.
D'ailleurs, la crise ne serait même pas née.
Les banquiers, sale race de parasites inutiles, n'existeraient peut-être même pas, la monnaie serait uniquement un instrument d'échange et non de profit ; bref, "l'intendance suivrait", comme dans toute société normalement organisée.
Pourquoi cette désagréable nécessité de s'intéresser à la finance et à l'économie, disciplines des plus ennuyeuses et des plus indignes d'un homme de goût ?
Tout simplement parce que le Système périt par où il a péché et qu'à la racine du problème, de tous les problèmes modernes, il y a l'avidité, l'esprit de lucre, l'appât du gain. Moteur remplaçant de toutes les fois déchues, outil de confort, d'épaisse et consolante matérialité.
Certes, ce n'est pas là que les nostalgiques et les idéalistes attendent leur espoir de révolution. Mais c'est bien de là qu'il pourrait naître.
Alors, il faut bien essayer de comprendre, et tant pis si on manque de diplômes en pseudo-sciences pour scruter les arcanes fêlés de la Grande Boutique qui prétend nous apporter bonheur et prospérité.
Pour le moment, prière de le croire, rien ne paraît irrémédiable. Rien n'a l'air fichu, rien ne semble perdu pour les amateurs de notre belle civilisation baignée d'eau de rose consumériste et global-villagiste.
A regarder le journal de vingt heures, à lire les journaux, à twitter et facebooker gentiment dans le cyber-espace, il ne s'est presque rien passé. Crise virtuelle aussi, finalement. Ça va repartir à la hausse. "Tout-va-bien", on vous dit.
S'il n'y avait quelques illuminés, comme Philippe Grasset et Patrick Reymond, pour insinuer perfidement que le leader métisso-présidentié de l'Occident, du monde libre, annonciateur de la grande partouze parousie planétaire, est en plein effondrement, c'est qu'on y croirait presque, à l'inéluctabilité de cette ouate médiatiquement annoncée, bercé qu'on est par la douce quiétude de ce mois d'août...
Vous y croyez, vous ?
Pas moi.
Je pense même que la plus grande crise de système et de civilisation, depuis deux bons siècles, notre seul espoir de réveil et de rétablissement, a déjà commencé.
Et que la principale confirmation en est que toute l'officialité s'escrime à nous persuader du contraire.
Sur la plage, au mois d'août...
19:33 Écrit par Boreas dans Crise, Economie, Politique, Société | Lien permanent | Tags : reprise, croissance, propagande, médias, etats-unis, usa, patrick reymond, philippe grasset, france, europe, chine, économistes, politiciens | Facebook | | Imprimer | |