24/07/2014
Europe, Russie, Etats-Unis : un ménage à trois
Au G-8 en Irlande, en juin 2013
Depuis des années, les pays occidentaux font comme si Moscou était devenu un partenaire démocratique acceptable, en échange de faveurs économiques que le chef du Kremlin leur dispense ou qu'il leur fait miroiter.
Les dirigeants de l'Occident ferment les yeux et acceptent d'évoluer dans la réalité virtuelle conçue dans les laboratoires de propagande de Moscou. Cela pour l'amour des affaires florissantes avec les oligarques russes ou l'espoir d'un rabais sur le prix du gaz. D'Angela Merkel à David Cameron en passant par François Hollande, les leaders des grandes puissances d'Europe occidentale ont choisi la voie facile.
L'équation est simple : personne ne met en danger sa popularité, c'est-à-dire sa politique interne – qui dépend en fait du prix du chauffage en hiver – pour des prises de position susceptibles d'ennuyer Poutine.
L'opinion publique doit réagir
Les hommes politiques européens n'ont plus, depuis longtemps, le courage de prendre position pour des principes sains, malgré l'opinion publique qui peut montrer ou même ressentir une réelle indignation envers les abus de la Russie. Elle ne manquera pas de les sanctionner par les urnes si, par exemple, le gaz devait voir son prix augmenter de manière significative. Au fond, les politiciens ne font que donner à la populace ce qu'elle mérite.
Au final, l'annexion de la Crimée, la guerre dans l'est de l'Ukraine et la recherche des coupables du crash de l'avion de la Malaysia Airlines ne sont que des sujets de bavardage autour d'une bière et de la une des journaux. Les politiciens ne risquent pas de déclencher la colère du Kremlin et de provoquer l'inconfort de leurs propres électeurs, habitués depuis plus d'un demi-siècle à une vie paisible et opulente. Le seul cas de figure qui permettrait un autre scénario impliquerait que l'opinion publique occidentale exerce une pression réelle et ferme, indiquant clairement à ses gouvernants qu'ils sont prêts à renoncer, par principe, à leur niveau de vie.
Surtout ne pas blesser la Russie
Au risque de paraître cynique, je ne crois pas qu'un tel scénario puisse advenir. Les Européens de l'Ouest sont tentés de ne pas intervenir en espérant que les vagues russes s'arrêteront à leurs frontières. Voire même à s'allier avec les Russes, à condition d'y trouver leur compte !
Et les Américains, me direz-vous ? Resteront-ils les bras croisés ? Ménage à trois ! Pendant que les Etats-Unis bayaient aux corneilles, la demoiselle Europe s'est laissé conter fleurette par le brigand russe. Eh bien, si la volage Europe préfère batifoler secrètement avec la Russie, que peuvent-ils faire ? Que faire lorsque l'épouse se lasse du mari et s'éclipse tous les jours dans la guérite du garçon de piscine ? On essaie de discuter, on la secoue un peu et, au final, on la laisse partir. Peut-être qu'elle préfère être avec un jeunot ou peut-être que cela lui servira de leçon et qu'elle reviendra repentie.
(Je remercie @Erone pour le tuyau.)
02:48 Écrit par Boreas dans Crise, Géopolitique, Propagande, Psychologie, Stratégie | Lien permanent | Tags : europe, russie, etats-unis, ukraine, crimée, donbass, avion de ligne abattu, malaysia airlines, politiciens, vladimir poutine | Facebook | | Imprimer | |
22/07/2014
Le Questionnaire
Si je me permets de reprendre, pour ce billet mi-sérieux, mi-grotesque, le titre du chef-d'oeuvre d'Ernst Von Salomon (un livre absolument indispensable à la compréhension de la deuxième guerre mondiale, de l'âme allemande et de la vraie nature de la dignité humaine), c'est parce qu'un débilo-complotiste de bas étage m'y a fait songer sur un autre blog, en m'enjoignant ainsi qu'à @Tarkan (« réponse urgente et argumentée attendue ») de répondre à dix questions comme si, nous aussi, nous étions suspects d'avoir commis des actions pas très ragoûtantes, ainsi que l'était aux yeux des Alliés le peuple allemand dans son ensemble, au milieu de ses ruines, en 1945.
Dix questions pondues, cette fois-ci, par le ministre délégué à la Défense de la Fédération de Russie, Anatoli Antonov et qui, selon ce haut personnage, seraient susceptibles, je n'invente rien, de contribuer à la prévention de catastrophes aériennes comme celle du MH17 que son gouvernement déplore mais qui, à l'insu de son plein gré, vient de se produire en Ukraine.
Dix questions qui, bien sûr, ne nous ont pas été présentées comme émanant de l'Etat russe, mais comme un genre de production éthérée, que l'ahuri qui nous les agitait virtuellement sous le nez venait subitement de sortir d'un vaste chapeau d'initié, sorte de corne d'abondance pleine de toutes ces fumisteries d'embrouilleurs ourdies dans de vagues officines, que ces idiots utiles, tout à l'extase d'une supposée trempette dans les coulisses du monde, croient donner sur un océan de secrets à eux seuls réservés.
Bref, un illuminé novorussien, brandissant probablement un bout de ruban de Saint Georges sur son canapé quelque part en France, nous défie de franchir le Seuil.
Que faire ? Eh bien, pour ma part, j'ai choisi la dérision. Ces gens-là ont beaucoup d'humour (ils me traitent quasi-quotidiennement de renégat, de traître et de crétin, c'est vous dire), alors pour espérer rivaliser, autant y aller carrément et essayer de me mettre dans la peau d'un poutinolâtre moyen - fin, cultivé et d'une indépendance d'esprit à toute épreuve.
21:41 Écrit par Boreas dans Crise, Géopolitique, Histoire, Identité, Propagande, Psychologie, Stratégie | Lien permanent | Tags : le questionnaire, ernst von salomon, débilo-complotistes, débilo-complotisme, russie, anatoli antonov, ukraine, donbass, terroristes, avion de ligne abattu, malaysia airlines, lance-missiles buk, missiles sam, vladimir poutine | Facebook | | Imprimer | |
La musique est comme une vague de chaleur
20:03 Écrit par Boreas dans Musique | Lien permanent | Tags : alannah myles, black velvet, 1989 | Facebook | | Imprimer | |
20/07/2014
URSS : amnésie d'Etat
Je découvre un peu tard (il date du 24 juin dernier) cet article extraordinaire, qui me laisse sans voix :
Perm-36, l'unique musée sur la répression politique en URSS, menacé de fermeture
L'unique musée russe retraçant l'histoire de la répression politique en Union soviétique, dans l'ancien camp du goulag Perm-36, pourrait bientôt fermer après la suppression de son financement public, a rapporté mardi l'ONG Memorial qui le gère.
Ce musée, qui se focalise sur la vie des dissidents au goulag soviétique, est installé dans l'enceinte de ce camp de travail situé à 100 kilomètres de Perm, dans l'Oural.
Il s'agit de l'un des camps les plus célèbres, bien conservé, qui a abrité principalement des prisonniers politiques pendant plus de 40 ans.
« Actuellement, les visites n'ont plus lieu, l'électricité du musée a été coupée et tous les employés ont été placés en congé sans solde pour une période indéterminée », a expliqué par téléphone à l'AFP Robert Latipov, le directeur de la section locale de Memorial.
Le fonctionnement du musée dépend en effet en grande partie du financement public octroyé par les autorités de la région, qui a été coupé « sans explications » il y a plus d'un mois, selon l'ONG.
09:34 Écrit par Boreas dans Crise, Histoire, Politique, Propagande, Psychologie, Société, Stratégie | Lien permanent | Tags : russie, urss, amnésie, dissidents soviétiques, prisonniers politiques, goulag, répression politique, perm-36, musée, fermeture, financement, suppression | Facebook | | Imprimer | |
Pour en finir avec le mythe de la Russie née à Kiev...
... Il suffit de lire cet article ou mieux, celui-ci ou, encore mieux, ce livre.
La Russie en tant que telle n’existe pas avant la fin du XVe siècle (sous la forme de la principauté de Moscovie), voire pas avant 1547 où, nous dit Wikipedia, « Ivan IV le Terrible prend le titre de "tsar de toutes les Russies" et non de la seule Rous’ (c’est-à-dire d’une partie de la principauté de Kiev dont les territoires sont sous la domination de l’État polono-lituanien) ».
Je renvoie par ailleurs à un précédent billet sur la question.
09:06 Écrit par Boreas dans Crise, Géopolitique, Histoire, Identité, Propagande, Psychologie, Stratégie | Lien permanent | Tags : russie, ukraine, moscovie, rous' de kiev | Facebook | | Imprimer | |
18/07/2014
Amateurs crétins
Plus d'informations partout dans les médias, mais aussi ici. Un résumé de la vidéo ci-dessus peut être trouvé là.
00:35 Écrit par Boreas dans Crise, Géopolitique, Psychologie | Lien permanent | Tags : ukraine, donbass, russie, terroristes, avion de ligne abattu, malaysia airlines, lance-missiles buk, missiles sam, igor bezler, vassili gueranine, igor strelkov | Facebook | | Imprimer | |
17/07/2014
Les étoiles seront vos yeux et le vent sera mes mains
21:16 Écrit par Boreas dans Musique, Nature, Philosophie, Poésie | Lien permanent | Tags : handsome family, far from any road | Facebook | | Imprimer | |
15/07/2014
Progrès et regrès
Bientôt, l'humain sera réellement « néo »...
« Il reste entendu que tout progrès scientifique accompli dans le cadre d’une structure sociale défectueuse ne fait que travailler contre l’homme, que contribuer à aggraver sa condition. » (André Breton. Le Figaro littéraire, 12 octobre 1946)
« En comparant l’état des connaissances humaines avec les états précédents, Fontenelle découvrit non pas précisément l’idée de progrès, qui n’est qu’une illusion, mais l’idée de croissance. Il vit assez bien que l’humanité, à force de vivre prend de l’expérience et aussi de la consistance. (…) Progrès ne voulut pas dire autre chose d’abord qu’avancement, marche dans l’espace et dans le temps, avec ce qu’implique d’heureux un état de constante activité. Plus tard, on donna à ce mot le sens d’amélioration continue (Turgot), indéfinie (Condorcet) et il devint ridicule. » (Remy de Gourmont. Sur Fontenelle. Promenades littéraires. Mercure de France, 1906)
Cela fait des décennies, sinon un siècle ou deux, que des gens cherchent le mot, l’ont « sur le bout de la langue », qu’il leur échappe, leur laissant une vive et chagrine frustration – sans le mot comment dire la chose ? Comment donner et nommer la raison du désarroi, de la révolte, du deuil et pour finir du découragement et d’une indifférence sans fond. Comme si l’on avait été amputé d’une partie du cerveau : amnésie, zone blanche dans la matière grise. La politique, en tout cas la politique démocratique, commence avec les mots et l’usage des mots ; elle consiste pour une part prépondérante à nommer les choses et donc à les nommer du mot juste, avec une exactitude flaubertienne. Nommer une chose, c’est former une idée. Les idées ont des conséquences qui s’ensuivent inévitablement. La plus grande part du travail d’élaboration de la novlangue, dans 1984, consiste non pas à créer, mais à supprimer des mots, et donc des idées – de mauvaises idées, des idées nocives du point du vue du Parti –, et donc toute velléité d’action en conséquence de ces mots formulant de mauvaises idées. Ce mot nous l’avons approché quelquefois, nous avons essayé « regret », c’était joli « regret », un à-peu-près qui consonnait, même s’il appartenait à un autre arbre étymologique. Une autre fois, nous avons dit « régrès » en croyant créer un néologisme, une déclinaison de « régression » qui rimerait avec « progrès », terme à terme. Nous y étions presque. Nous sommes tombés sur « regrès », il y a fort peu de temps, un bon et vieux mot de français, « tombé en désuétude » comme on dit, bon pour le dictionnaire des obsolètes qui est le cimetière des mots. Et des idées. Et de leurs conséquences, bonnes ou mauvaises.
Il est évidemment impossible de croire que le mot « regrès », l’antonyme du « progrès » ait disparu par hasard de la langue et des têtes. Le mouvement historique de l’idéologie à un moment quelconque du XIXe siècle a décidé que désormais, il n’y aurait plus que du progrès, et que le mot de regrès n’aurait pas plus d’usage que la plus grande part du vocabulaire du cheval aujourd’hui disparu avec l’animal et ses multiples usages qui entretenaient une telle familiarité entre lui et l’homme d’autrefois. Ainsi les victimes du Progrès, de sa rançon et de ses dégâts, n’auraient plus de mot pour se plaindre. Ils seraient juste des arriérés et des réactionnaires : le camp du mal et des maudits voués aux poubelles de l’histoire. Si vous trouvez que l’on enfonce des portes ouvertes, vous avez raison. L’étonnant est qu’il faille encore les enfoncer.
23:11 Écrit par Boreas dans Crise, Economie, Histoire, Identité, Nature, Politique, Propagande, Psychologie, Société, Stratégie | Lien permanent | Tags : progrès, regrès, régression, monopole idéologique, novlangue, technologie, high tech, transhumanisme, progressisme, réaction, réactionnaires, communisme, fascisme, nazisme, homme nouveau, totalitarisme, machine | Facebook | | Imprimer | |
14/07/2014
Idéalisme
(Merci à mon aîné G. de m'avoir fait découvrir cette magnifique chanson sortie en 1971, mais hors du temps.)
08:17 Écrit par Boreas dans Crise, Identité, Musique, Philosophie, Poésie, Psychologie, Société | Lien permanent | Tags : jean-roger caussimon, les coeurs purs, idéalisme | Facebook | | Imprimer | |
12/07/2014
Les actes au bout des idées
L'Ukraine n'est décidément pas la France, où nous ne sommes pas près de voir nos braves politiciens, même « dissidents », au niveau de leurs déclarations... On n'imagine pas Florian Philippot ou Louis Aliot, pas plus que Jean-François Copé ou Arnaud Montebourg, au milieu de nos soldats, en zone de combat, au Mali ou en Centrafrique. Ni même sur le front, si jamais il devait y avoir une guerre en France.
Eh bien Dmytro Yaroch, lui, le chef du Pravyi Sektor, encore candidat, il y a moins de deux mois, à la présidence de la république ukrainienne, c'est différent. On le voit ici il y a deux jours, au milieu de ses camarades, faire le coup de feu du côté de Karlivka, près de Donetsk, pour libérer son pays. Chapeau (il en porte un, tiens - même pas de casque).
19:42 Écrit par Boreas dans Crise, Géopolitique, Identité, Politique, Psychologie, Société | Lien permanent | Tags : actes, idées, ukraine, donbass, dmytro yaroch, pravyi sektor, secteur droit, france, politiciens, dissidents | Facebook | | Imprimer | |