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04/12/2013

Glissement propagandique

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En répondant par un « bonne nouvelle » réjoui à mon observation selon laquelle l'antiracisme ne fonctionne plus et est mort en France (ce qui n'a rien d'original : Pierre S., par exemple, le martèle sur son fil Twitter), mon ami Hoplite me donne, sur son excellent blog, l'occasion d'une mini-synthèse sur le sujet.

Bonne nouvelle, la mort de la propagande antiraciste ?

Pas si sûr.

D'une part, si vraiment l'homme de la rue n'est majoritairement plus dupe des bobards systémiques, nous sommes peut-être (je pense : « probablement », mais ce n'est guère plus qu'une intuition, certes étayée de myriades d'indices) en train de passer insensiblement, toutes proportions gardées, du carcan brejnevo-andropovien à l'horizon gorbatchevo-eltsinien, avant/pendant un effondrement suivi d'une éventuelle restauration politique d'allure poutinienne.

Mais d'autre part, l'omniprésence allogène et communautariste fait bouger les lignes cognitives et sémantiques dans le pays réel. La médiasphère, dans sa torpeur ouatée, a simplement un temps de retard.

En réalité, le système de domination n'a plus besoin de la propagande antiraciste (laquelle se fonde, en fait, sur le « racisme » tant honni, le banalise et en définitive l'alimente) et est en train de passer à autre chose : une sorte de consolidation/accentuation Multikulti, fondée sur le fait accompli de l'immigration-invasion et sur la victimisation à outrance des immigrés comme moteur de la culpabilisation des Français de sang.

De fait, le modèle communautariste anglo-saxon a complètement supplanté le modèle assimilationniste républicain (lui-même abusivement extrapolé, depuis quarante ans, à partir de principes constitutionnels datant d'une époque d'immigration zéro et qui, nulle part, ne font référence à la moindre volonté d'importer massivement des allogènes, ni aux soi-disant obligations universelles qui découleraient, selon les « extrémistes républicains » omniprésents aujourd'hui, de la philosophie à l'origine de ces principes).

Donc, la propagande antiraciste du vivre-ensemble, bisounours et utopiste, datant du temps de cet assimilationnisme, qui nécessitait des manifestations monstres pour nous démontrer, à nous autres ploucs, que nous étions tous frères - enfin, surtout que tous les autres étaient nos frères - n'est plus nécessaire au Régime. Poubelle. Et d'ailleurs, cette propagande, plus personne n'y croit, devant l'évidence des faits, réelle et supposée, du « choc des civilisations ».

En revanche, le pouvoir a glissé vers une propagande culpabilisatrice, voire terroriste, ce qui est bien sûr dangereux, car cela excite tous les antagonismes ; sans parler de dédouaner par avance les exactions commises par des « chances pour la France », au moins aux yeux de leurs auteurs.

L'arme de la division et de la peur est néanmoins à double tranchant, dans la mesure où les politiciens et requins court-termistes qui l'utilisent hypothèquent leur propre avenir et celui des leurs : tôt ou tard, il faut donner aux pauvres-victimes-allogènes des gages de multiculturalisme et de parité et donc, leur abandonner (en réalité, abandonner, le plus souvent, à des personnalités de couleur aussi peu représentatives de l'immigré lambda que le politicien autochtone l'est du « Fromage » qui le gave de ses impôts) une partie de plus en plus significative des bonnes places devant la Sainte Gamelle...

L'usage de cette arme correspond au moins, de la part du Régime, à un aveu de faiblesse et en tout cas, d'impuissance devant une réalité anthropologique impossible à plier aux utopies libérales libertaires.

En cela, oui, la faillite de l'antiracisme est une bonne nouvelle.

Mais enfin, on est quand même passé à un autre degré de propagande, bien plus violent et nuisible encore.

Sur ce terrain comme sur celui de la dissidence en général, l'heure des bisounourseries est vraiment révolue.

22/06/2013

L'homme révolté

 

« Qu'est-ce qu'un homme révolté ? Un homme qui dit non. Mais s'il refuse, il ne renonce pas : c'est aussi un homme qui dit oui, dès son premier mouvement. Un esclave, qui a reçu des ordres toute sa vie, juge soudain inacceptable un nouveau commandement. Quel est le contenu de ce "non" ?

Il signifie, par exemple, "les choses ont trop duré", "jusque-là oui, au-delà non", "vous allez trop loin", et encore, "il y a une limite que vous ne dépasserez pas". En somme, ce non affirme l'existence d'une frontière. On retrouve la même idée de limite dans ce sentiment du révolté que l'autre "exagère", qu'il étend son droit au-delà d'une frontière à partir de laquelle un autre droit lui fait face et le limite. Ainsi, le mouvement de révolte s'appuie, en même temps, sur le refus catégorique d'une intrusion jugée intolérable et sur la certitude confuse d'un bon droit, plus exactement l'impression, chez le révolté, qu'il est "en droit de...". La révolte ne va pas sans le sentiment d'avoir soi-même, en quelque façon, et quelque part, raison. C'est en cela que l'esclave révolté dit à la fois oui et non. Il affirme, en même temps que la frontière, tout ce qu'il soupçonne et veut préserver en deçà de la frontière. Il démontre, avec entêtement, qu'il y a en lui quelque chose qui "vaut la peine de...", qui demande qu'on y prenne garde. D'une certaine manière, il oppose à l'ordre qui l'opprime une sorte de droit à ne pas être opprimé au-delà de ce qu'il peut admettre.

En même temps que la répulsion à l'égard de l'intrus, il y a dans toute révolte une adhésion entière et instantanée de l'homme à une certaine part de lui-même. Il fait donc intervenir implicitement un jugement de valeur, et si peu gratuit, qu'il le maintient au milieu des périls. Jusque-là, il se taisait au moins, abandonné à ce désespoir où une condition, même si on la juge injuste, est acceptée. Se taire, c'est laisser croire qu'on ne juge et ne désire rien et, dans certains cas, c'est ne désirer rien en effet. Le désespoir, comme l'absurde, juge et désire tout, en général, et rien, en particulier. Le silence le traduit bien. Mais à partir du moment où il parle, même en disant non, il désire et juge. Le révolté, au sens étymologique, fait volte-face. Il marchait sous le fouet du maître. Le voilà qui fait face. Il oppose ce qui est préférable à ce qui ne l'est pas. Toute valeur n'entraîne pas la révolte, mais tout mouvement de révolte invoque tacitement une valeur. S'agit-il au moins d'une valeur ?

Si confusément que ce soit, une prise de conscience naît du mouvement de révolte : la perception, soudain éclatante, qu'il y a dans l'homme quelque chose à quoi l'homme peut s'identifier, fût-ce pour un temps. Cette identification jusqu'ici n'était pas sentie réellement. Toutes les exactions antérieures au mouvement d'insurrection, l'esclave les souffrait. Souvent même, il avait reçu sans réagir des ordres plus révoltants que celui qui déclenche son refus. Il y apportait de la patience, les rejetant peut-être en lui-même, mais, puisqu'il se taisait, plus soucieux de son intérêt immédiat que conscient encore de son droit. Avec la perte de la patience, avec l'impatience, commence au contraire un mouvement qui peut s'étendre à tout ce qui, auparavant, était accepté. Cet élan est presque toujours rétroactif. L'esclave, à l'instant où il rejette l'ordre humiliant de son supérieur, rejette en même temps l'état d'esclave lui-même. Le mouvement de révolte le porte plus loin qu'il n'était dans le simple refus. Il dépasse même la limite qu'il fixait à son adversaire, demandant maintenant à être traité en égal. Ce qui était d'abord une résistance irréductible de l'homme devient l'homme tout entier qui s'identifie à elle et s'y résume. Cette part de lui-même qu'il voulait faire respecter, il la met alors au-dessus du reste, et la proclame préférable à tout, même à la vie. Elle devient pour lui le bien suprême. Installé auparavant dans un compromis, l'esclave se jette d'un coup ("puisque c'est ainsi...") dans le Tout ou Rien. La conscience vient au jour avec la révolte.

Mais on voit qu'elle est conscience, en même temps, d'un tout, encore assez obscur, et d'un "rien" qui annonce la possibilité de sacrifice de l'homme à ce tout. Le révolté veut être tout, s'identifier totalement à ce bien dont il a soudain pris conscience et dont il veut qu'il soit, dans sa personne, reconnu et salué - ou rien, c'est-à-dire se trouver définitivement déchu par la force qui le domine. À la limite, il accepte la déchéance dernière qui est la mort, s'il doit être privé de cette consécration exclusive qu'il appellera, par exemple, sa liberté. Plutôt mourir debout que de vivre à genoux. (...) »

Albert Camus, L'homme révolté, 1951

21/12/2011

La croissance, c'est fini

Vision post-apocalyptique de Londres (tiens, pourquoi Londres ?)

 

On nous bassine avec les remèdes à l'endettement : faut se serrer la ceinture et bosser, nous dit-on.

Or, ce n’est pas le tout de proposer un travail acharné (le maximum dont est capable la « vertu » bourgeoise, et de préférence si ce sont d’autres qui le font), en plus de telle ou telle prétendue solution financière à la crise – planche à billets, austérité, ou mélange des deux.

Encore faut-il, quand même, que cela serve à quelque chose.

L’idéologie libérale table sur une notion fondamentale, commune au marxisme d’ailleurs : la croissance infinie.

Sans elle, rien ne marche plus.

L’immobilisme, la conservation et le simple renouvellement de ce qui existe ne suffisent jamais à cette grande ambition.

Le Progrès, autre mythe fondateur des « Lumières », exige toujours davantage de moyens matériels, pour finir par faire du monde un paradis et de l’homme une merveille.

Entre parenthèses, on voit bien à quel point ces fadaises ont réussi, non ?

Ah oui, pardon, c’est vrai, nous avons des smartphones, la télé HD et Michel Drucker dedans… Youpi.

Si nous sommes dans la fuite en avant financière pour retarder l’inévitable effondrement économique, ce n’est donc, finalement, qu’un prolongement logique de la fuite en avant dans la croissance.

Qu’une manière d’appliquer aux signes produits par le monde de la croissance, le même traitement que pour obtenir la croissance elle-même.

En effet, comment continuer de s’enrichir toujours davantage (sans parler de simplement entretenir et renouveler tout ce qu’on a accumulé), si ce qui est produit ne se vend plus ?

Autrement dit, pour remédier à l’absence d’acheteurs, que reste-t-il ?

A faire comme si les acheteurs achetaient toujours, pardi.

A mettre dans le circuit des biens qu’ils n’achèteront pas, de l’argent (crédit bancaire, transfert de la richesse publique à la fortune privée, primes d’Etat, cavalerie bancaire publique et privée…) pour permettre de les acheter quand même, et du bon vieux matraquage publicitaire pour y pousser.

Le problème est que cela appauvrit progressivement toute la société (d’abord les moins riches), en détruisant les emplois, en retirant petit à petit à la monnaie toute sa valeur, sans pour autant redonner à la croissance son élan.

Ni aux richesses, leur valeur d’avant la crise (exemple : les biens immobiliers).

Nous sommes, alors que le superflu est encore abondant et peu cher, dans une société où le point d’endettement maximal a été dépassé depuis longtemps.

Persistent les signes de l’opulence, les signes de la croissance et là, le marketing a largement pris le pas sur la réalité.

Même la monnaie a cessé d’exister. Elle est devenue, en fait, le marketing de la monnaie (si on parle d’argent-dette, ce marketing a d’ailleurs existé dès le début).

Plus de croissance ? Mimons-la.

Et donc, produisons comme si nous avions encore des acheteurs.

Et donc, créons de l’argent, comme si ces acheteurs payaient toujours.

Et enfin, surtout, disons partout que tout va déjà mieux.

Le hic : comme dans un excellent film au cinéma, quand tout est feint au point que le spectateur s’oublie lui-même et perd la notion du réel, que se passe-t-il, malgré tout, à la fin de la représentation ?

Il faut bien sortir et retourner au quotidien.

Quand s’opérera une prise de conscience massive de ce qui constitue réellement une richesse (c’est simple, c’est accessible à tout le monde : par exemple, si on n’a pas de quoi manger, à quoi sert le superflu ?), il est fort possible que la société change brutalement, extrêmement vite.

Ah, l’image des hideuses zones commerciales désertées, envahies par les ronces et les genêts !…

J'en rêve.

C'est pour bientôt.