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03/07/2012

Les villes, laboratoire du communautarisme mondialisé

 

« La transformation des anciens quartiers populaires en quartiers bourgeois et l’appropriation d’un parc de logements historiquement destinés aux couches populaires par des catégories supérieures ne suscitent aucun émoi particulier. Alors que les discours incantatoires sur le manque de logements sociaux n’ont jamais été aussi présents, rares sont les politiques qui s’émeuvent aujourd’hui de la conquête par une petite bourgeoisie du parc privé “social de fait” des grandes villes.

Ce silence est d’autant plus étourdissant que c’est ce parc privé, et non le parc social, qui, jusqu’à aujourd’hui, a toujours répondu majoritairement aux besoins des couches populaires, et l’ampleur de cette perte ne sera que très partiellement compensée par la construction sociale.

Le changement de destination d’un parc de logements occupés depuis deux siècles par des catégories modestes est d’autant moins dénoncé qu’il bénéficie aux catégories supérieures et aux prescripteurs d’opinions. On arrive ainsi à une situation ubuesque où ces catégories moyennes et supérieures, celles qui participent le plus à l’éviction des catégories populaires et à l’appropriation de leurs logements, sont aussi celles qui plébiscitent le plus la mixité dans la ville et qui soulignent la nécessité de construire des logements sociaux.

En réalité, et au-delà des discours grandiloquents, ce sont des logiques foncières et patrimoniales qui déterminent les dynamiques à l’œuvre. Ainsi, si les espaces publics dans les grandes villes ont donné lieu à un partage savant qui permet de maintenir le décorum ouvriériste ou ethnique, les commerces ethniques et les hard-discounters côtoient désormais les bistrots-bobos et les supérettes bio. En revanche, la répartition du patrimoine immobilier ne fait l’objet d’aucune “négociation” de la part des couches supérieures. On accepte à la rigueur le maintien d’un parc social marginal (surtout s’il est destiné aux petites classes moyennes), mais pas le maintien dans le parc privé des catégories populaires. Dans ces quartiers, les bobos sont en train de se constituer un patrimoine d’une très grande valeur en acquérant de grandes surfaces industrielles, artisanales ou en réunissant de petits appartements. Les services des impôts ont ainsi enregistré une explosion des ménages payant l’ISF dans tous les quartiers populaires des grandes villes et notamment à Paris.

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