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07/08/2014

Bandéristes, et alors ?

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Andreï Zoubov est un historien russe, un des premiers intellectuels qui s’est prononcé contre l’annexion de la Crimée par la Russie. Professeur au MGIMO (l'Institut d'État des relations internationales de Moscou), il en a été licencié le 1er juillet 2014 pour ses opinions opposées à celles du Kremlin.

Du point de vue de l’Histoire, le mouvement nationaliste ukrainien était un mouvement nationaliste libérateur, anticommuniste.

En Union Soviétique, pour stigmatiser quoi que ce soit, surtout après la Deuxième Guerre Mondiale, il suffisait de l’appeler fascisme. Ainsi, les « banderovtsi » étaient appelés fascistes bien que ce ne soit pas vrai.

C’était une organisation nationaliste typique d'une période militaire, avec son armée et son aile terroriste. À cette époque-là, c’était courant. Bien sûr, certains chefs du mouvement nationaliste ukrainien s’inspiraient des idées de corporation de Mussolini. Mais le meilleur élève de Mussolini, c’était Joseph Staline. À mon avis, Staline était plus fasciste que Bandera et Mussolini même.

Tout nationalisme, surtout armé, est une chose terrible. Mais Bandera était mille fois moins atroce que le NKVD (police politique de l’Union soviétique) de Beria ou d’Abakoumov, luttant contre les « banderovtsi ».

Stepan Bandera habitait la région frontalière avec la Pologne, et pendant la Famine-Génocide (Holodomor), il avait vu les gens mourant de faim qui se précipitaient à travers la frontière sur le territoire polonais, et que les gardes-frontières soviétiques fusillaient. Et c’est pour ça qu’il détestait l’État soviétique.

Stepan Bandera ne luttait pas contre l’Ukraine, mais contre le système totalitaire soviétique qui tuait tout citoyen pour tout non-conformisme. C’est pourquoi tout essai de se libérer de cet État-là était déjà un élément de justice. Et en ce sens, le mouvement de Bandera est plus justifié du point de vue de la morale que le mouvement soviétique staliniste.

Et maintenant, 70 ans après, le mythe de Bandera s’est avéré très actuel. Du coup, les Russes se sont mis à avoir horreur de Bandera, du Secteur Droit (Pravyi Sektor), des massacreurs ukrainiens. Tout cela, ce sont des mythes qui empêchent les gens de réfléchir de manière critique.

Ce sont des directives d’idéologie soviétique. C’est clair. Pour les descendants des officiers du NKVD, leurs grands-pères luttaient vraiment contre les « banderovtsi ». Il y a surtout beaucoup de ces descendants en Crimée, où sont partis à la retraite d'anciens officiers du NKVD.

Pour moi, votre révolution, c’est la libération de l’Ukraine du régime soviétique voleur. C’est un grand succès. Davantage même, je crois que c’est un exemple à suivre pour nous, les Russes. Parce que pour nous, l’Ukraine est une partie de cet ancien grand État. Et maintenant elle réussit à s’ouvrir à quelque chose de plus digne. Pour nous, c’est une leçon importante. L’Ukraine se libère du soviétisme.

Vous allez en Europe. Je pense que la Fédération de Russie doit aussi aller en Europe. Il n’y a pas d’alternative à la voie européenne.

Source

(Ceci est la traduction, légèrement corrigée par mes soins, de la version condensée d'un article en russe paru dans l'Ukraïnska Pravda le 22 juillet 2014.)