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30/11/2013

Atmosphère, vous avez dit atmosphère ?

 

« Du centre de la Bretagne à Villeneuve-sur-Lot (Aquitaine), du département de l'Oise à Brignoles (Var), des zones industrielles du Nord et de l'Est frappées par le chômage de masse aux régions rurales et industrielles de l'Ouest et du Sud-Ouest atteintes par la crise du modèle intensif et l'essoufflement des capacités redistributives, le décrochage frappe des territoires différents mais qui ont en commun d'être à l'écart des métropoles. Cette France périphérique, qui rassemble 60 % de la population, est celle où se déroule le destin de la grande majorité des catégories populaires.

On peut ainsi relever qu'à l'Ouest la crise ne frappe pas Nantes ou Rennes, mais d'abord les espaces ruraux et industriels et les petites villes. La carte des plans sociaux est calée sur celle de la France périphérique, pas celle de la France métropolitaine, qui produit l'essentiel du PIB français. Pour la première fois dans l'histoire, les catégories populaires ne vivent pas là où se crée la richesse.

Ce qui implose sous nos yeux, ce n'est pas seulement un modèle économique, ce sont aussi nos représentations des classes sociales. Or il faut saisir que des catégories hier opposées, ouvriers, employés, petits paysans, petits indépendants, artisans et commerçants, ou encore retraités populaires, salariés fragilisés du privé comme du public, partagent un sort commun face aux conséquences désastreuses de l'adaptation à marche forcée au modèle économique mondialisé. (...)

La recomposition sociale et politique de la France périphérique dessine non seulement les lignes de nouvelles fractures culturelles, mais aussi une redynamisation à venir du débat et même du conflit en politique. Il convient désormais d'ouvrir les yeux sur le sort des catégories populaires dans la mondialisation. Plutôt que les leçons de morale et les discours incantatoires, prenons au sérieux un malaise social et identitaire qui affecte désormais une part majoritaire de la population. »

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19/09/2010

Electroencéphalogramme plat

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La plupart des gens ne pensent pas.

Quand je dis : "la plupart", j'estime la proportion de ces anencéphales virtuels à environ 95% de la population.

Et quand je dis : "ne pensent pas", je dois généralement préciser : "par eux-mêmes", justement parce que l'auditeur... ne pense pas. En effet, comment prétendre penser, s'il s'agit juste de régurgitation d'un conditionnement par autrui ?

Bref, ils ne pensent pas.

Néanmoins, ils croient penser, bien sûr.

D'ailleurs, quand je dis qu'ils ne pensent pas, cela ne choque personne. Aucune manifestation de susceptibilité, parce que l'auditeur croit qu'il n'est pas concerné. Mais aussi parce qu'il s'en fout, de penser.

Pour lui, ce n'est pas une valeur.

Ce qui se passe, c'est que les gens ne sont pas là pour penser, mais juste pour engouffrer.

Engouffrer deux douzaines de concepts basiques que leurs parents, le système scolaire, les médias, l'entreprise qui les emploie, leur conjoint, leur déversent dans ce qui leur sert de système d'orientation au sein de la société, et puis c'est marre.

Après, dans n'importe quelle situation, suffit de remuer tout ça, comme dans un shaker - "agitez bien !" -, et la réponse juste, l'attitude juste, c'est à dire adaptée au grand foutage de gueule général, sort comme d'un distributeur automatique, rétribuée en intégration collective, en gratifications sociales variées, en grégarisme renforcé.

Le prêt-à-penser, c'est ça. Et vous pouvez l'appliquer à quasiment toutes les situations, ça marche.

Engouffrer, ce n'est donc pas tout, puisqu'il y a aussi régurgiter, pour obtenir autre chose à engouffrer.

Mais tout de même, engouffrer, c'est le principal, pour l'Homo festivus.

Parce que le but de la vie de ces 95 % de non-pensants, consiste essentiellement à jouir et donc, à capter, acquérir, prendre, dérober, voler, garder, conserver, thésauriser, consommer, posséder, manger, ingérer, absorber, se goinfrer, profiter, savourer, se délecter, se goberger ; bref, à s'en foutre plein la poire, à s'en faire péter la sous-ventrière, à être un imbécile heureux de son indigestion.

Oui, parce qu'à la fin :

"Il n’y a que le ver pour faire aussi bonne chère qu’un empereur. Nous engraissons toutes les autres créatures pour nous engraisser, et nous nous engraissons nous-mêmes pour les asticots... Roi bien gras et mendiant maigre, cela ne fait qu’un menu varié – deux plats, mais pour une seule table. Tout finit par là."

(William Shakespeare, Hamlet - Acte IV, scène III)

Or doncques, vous qui pensez ou tentez au moins de le faire, sachez qu'il est inutile de discuter littérature, philosophie, poésie, arts en général, ou d'un quelconque sujet intelligent, avec l'immense majorité des braves gens qui vous entourent.

Ils n'y entravent que dalle, ils n'en pipent pas une broque, ils sont bouchés à l'émeri, ils ont la cervelle barrée.

Mais surtout, gardez bien ça en tête, ils s'en tamponnent le coquillard, ils s'en balancent, ils s'en battent l'oeil avec une queue de sardine, ils s'en soucient comme d'une guigne.

Et pourquoi ?

Simplement parce que penser, d'abord ils n'ont aucune, mais alors absolument aucune idée de ce que ça peut bien vouloir dire, et ensuite et principalement, à leurs yeux, ça ne rapporte rien, que des ennuis.

Eux, leur truc, c'est tout ce que j'ai déjà dit (en engouffrer un max, etc.).

Ça peut aller de se taper un bon gueuleton à s'acheter fort cher une voiture moche et inutile, de débiner un collègue pour prendre sa place à pleurer de joie au mariage d'un rejeton, de regarder le dernier épisode de "Plus belle la vie" à se payer le dernier smartphone (je mets le lien Wikipédia, parce que les gens intelligents savent rarement ce que c'est, alors que les cons, toujours)...

Il y a une infinité de choses que ces gens-là aiment et veulent.

Le tout premier indice de ce qu'on est peut-être en train de commencer à penser, c'est de s'apercevoir qu'on n'aime ni ne veut quasiment rien de ce que eux, ils aiment et veulent.

Là commencent les emmerdements, parce que sortir du prêt-à-penser, du mode festivus festivus, du processus binaire bien-mal noir-blanc juste-injuste, de la tétralogie conjoint-bagnole-maison-enfants qui débouche sur l'idéal : "Une vie réussie"... c'est le plus grand sacrilège qui soit, le plus grand blasphème contre la religion jouisseuse des anencéphales et des gastéropodes à visage humain.

Le sens, plutôt que le profit ; le fond, plutôt que la forme ; la vérité, plutôt que le plaisir ; la connaissance, plutôt que le savoir ; voilà des aspirations que les déficitaires du bulbe, les bas du front, les étroits du bonnet et les nécessiteux du neurone ne vous pardonneront pas.

Non pas parce qu'ils seront jaloux de votre intelligence pour elle-même (bien qu'ils sentent parfois confusément que ça leur manque), mais parce qu'ils croiront que vous détenez quelque chose qui pourrait leur profiter ; pour briller en société, ou lever davantage de poules, ou monter des combines lucratives, par exemple.

Donc, ils vous créeront des emmerdes, pour voir s'ils ne pourraient pas vous prendre quelque chose ou, au moins, se prouver que, finalement, vous n'êtes que de la daube.

Par conséquent, si vous voulez vivre tranquille, passez plutôt pour un inoffensif original, pour un savant cosinus, pour un gentil fada.

Et puis, comme disait Courteline, "Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet."

Il aurait pu ajouter que, de toute façon, on n'a pas vraiment le choix.

C'est ça, ou rejoindre le troupeau, ce qui est impossible.

Apprendre à penser, c'est un voyage sans retour.