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05/07/2014

Dmytro Yaroch : « Ni l’OTAN, ni l’UE »

 

Il est le patron. Mystérieux, résolu, incontesté pour les siens, au parcours discutable pour d’autres. Il a mené son mouvement Pravyi Sektor à travers l’épopée de la révolution ukrainienne, de la lutte clandestine aux barricades et maintenant pointe droit vers le Parlement.

Est-il un guérillero ? Un 007 à la solde de puissances étrangères ? Est-il un révolutionnaire ou un chef de bande avec du flair pour une carrière politique ? Ce qui est certain, c’est que le nom seul de Dmytro Yaroch enflamme et divise l’opinion publique au sujet de la complexe question ukrainienne, entre partisans et détracteurs. Il a accordé une interview exclusive à Il Primato Nazionale [journal en ligne italien].

Quelle est la situation actuelle en Ukraine, du point de vue social et politique ?

La situation est assez compliquée. Même avant l’arrivée de Ianoukovitch au pouvoir, nous disions que dans notre pays il existait un régime d’occupation intérieure. Pendant le gouvernement de Ianoukovitch, la nature anti-populaire de ce régime a atteint son point culminant. Aujourd’hui, après la fuite de Ianoukovitch, ce régime a craqué, mais n’a pas été entièrement démantelé. Le Parti des régions et le Parti communiste n’ont pas été interdits. L’opposition d’hier ne contribue pas à la lutte contre la corruption. On ne remarque pas encore de ces changements qui conduisent à la construction d’une société juste et solidaire.


Que pensez-vous du nouveau gouvernement provisoire de l’Ukraine ?

Au début, nous avons essayé de ne pas critiquer le nouveau gouvernement, pour éviter de déstabiliser la situation dans le pays. Mais maintenant, nous devons constater que le gouvernement provisoire manque de professionnalisme et de patriotisme. Cela se voit clairement, par exemple dans la perte de la Crimée, dans la tolérance à la corruption et aussi dans l’impuissance vis-à-vis des ennemis internes et externes. Différents éléments du gouvernement actuel prennent la route de la contre-révolution. Mais la révolution nationale, en tout cas, doit se poursuivre. Il est souhaitable qu’elle continue de manière pacifique ; cependant, les activités de ce gouvernement pourraient provoquer une nouvelle vague de colère populaire.

Certains disent que la révolution a été financée par des personnages connus, tels que Soros et Bernard-Henri Lévy, et même par des politiciens occidentaux comme Obama. Qu’en pensez-vous ?

L’Occident était probablement intéressé aux protestations qui auraient obligé Ianoukovitch à changer sa propre ligne géopolitique. Il est probable que certains efforts aient été faits dans ce sens. Néanmoins, les pays occidentaux ont considéré Ianoukovitch comme le président légitime, même quand nos concitoyens sont morts pour les rues de Kiev. Lévy a certains intérêts idéologiques en Ukraine. Soros, des intérêts idéologiques et économiques. Obama, même s’il appartient au parti démocrate, raisonne suivant les termes impérialistes américains. Mais aucun d’entre eux n’a besoin d’un Etat ukrainien fort.

Que pensez-vous de l’OTAN et de l’UE ? Que pensez-vous des Etats-Unis ?

Nous sommes contre l’adhésion à l’UE et l’OTAN. Nous serions heureux de coopérer avec l’UE et de l’OTAN, mais sur un pied d’égalité. Cela dit, nous ne voulons pas perdre une partie de notre souveraineté en rejoignant ces structures et, de la même manière, nous n’acceptons pas l’idéologie qui prévaut actuellement dans l’UE. Et plus encore, nous ne voulons pas nous associer à la politique impérialiste de l’OTAN. La révolution qui a éclaté en Ukraine est due à la colère populaire contre un gouvernement corrompu et criminel. Même l’illusion de l’UE a joué son rôle, mais c’était secondaire. Aujourd’hui, nous, nationalistes, tentons de faire comprendre au peuple qu’on ne doit pas espérer dans l’UE ou dans l’OTAN, mais qu’on doit compter seulement sur ses propres forces. Malheureusement, Poutine nous contrarie dans la diffusion de notre message. Précisément, Poutine est le premier promoteur de l’intégration européenne : avec sa politique impérialiste, il pousse les Ukrainiens à espérer en une l’aide de l’Occident. Au contraire, le comportement des pays occidentaux détruit les illusions d’euro-intégration de nombreux Ukrainiens. Envers les États-Unis, nous ne nourrissons aucune haine pathologique. Nous nous rendons compte, cependant, que ce pays cherche l’hégémonie mondiale et nous sommes opposés à un tel but. Nous sommes pour un monde multipolaire, un monde sans impérialismes, un monde dans lequel chaque nation soit apte à maintenir ses propres liberté, identité et spiritualité.

Quels sont vos points de référence politiques et culturels ? Si vous pouviez décrire la vision politique et culturelle du Pravyi Sektor, que diriez-vous ?

Nous suivons l’idéologie classique du nationalisme ukrainien et, à travers cette idéologie, nous essayons de trouver des réponses aux défis d’aujourd’hui. Il est question de la fidélité à une idéologie formée au milieu du XX siècle et à son développement créateur, à son adaptation aux exigences du présent. La base incontestée du nationalisme ukrainien est le christianisme. Nous distinguons clairement le concept de nationalisme de concepts tels que le chauvinisme, la xénophobie et l’impérialisme. Le cœur de notre mouvement sont des gens fidèles à l’idéologie nationaliste et aux valeurs chrétiennes conservatrices. Il s’agit souvent de gens qui sont pleins de l’esprit noble du Moyen Age. Dans le même temps, nous sommes prêts à répondre à des questions pragmatiques, nous proposons des solutions à la population pour s’attaquer aux problèmes sociaux, économiques, etc.

Votre révolution est-elle dirigée contre le peuple russe, contre le gouvernement russe ou contre les Ukrainiens qui sont en faveur de la Russie ? Quel avenir voulez-vous pour les Ukrainiens qui parlent russe ?

Notre révolution est avant tout destinée à protéger les intérêts stratégiques de notre nation. En ce qui concerne la Russie, elle est dirigée contre l’impérialisme russe. Comme preuve du fait que nous ne sommes pas russophobes, nous faisons remarquer que nombre des combattants du Pravyi Sektor étaient des citoyens russes. Ces personnes sont venues soutenir la révolution ukrainienne et sont bien conscientes du fait que le régime de Poutine est en fait anti-russe.

Aujourd’hui, de nombreux patriotes russes sont derrière les barreaux pour leurs actions. En ce moment, les Russes sont moralement et physiquement laissés à l’abandon, laissés à se dissoudre dans une mer de peuples non-russophones. Il est probable que le prochain président de la Russie sera carrément le Tchétchène Ramzan Kadyrov. Pour cette raison, de nombreux Russes comprennent que le seul moyen de sauver leur nation est de détruire l’empire. Avec les gens conscients de cela, nous avons toujours travaillé et nous continuerons de le faire. Pour ce qui est des citoyens russophones d’Ukraine, beaucoup d’entre eux font partie du Pravyi Sektor. Nous pouvons dire que parmi nos citoyens qui parlent russe, il y a beaucoup de patriotes. La russification est vraiment un problème ; un problème similaire, mais encore plus grand, existe en Irlande. Nous ferons revivre la langue et la culture ukrainiennes, non par la répression, mais par la création, la diffusion et la pratique de cette dernière. Tout ceci sera possible seulement quand nous atteindrons le vrai état national.

Que pense le “Pravyi Sektor” de la Crimée et du référendum qui a concerné la séparation de la péninsule d’avec l’Ukraine ?

Nous croyons que la Crimée est un territoire commun aux Ukrainiens et aux Tatars de Crimée. Cependant, de nombreuses minorités vivent là-bas, pas seulement des Russes, mais aussi des Grecs, des Arméniens, des Estoniens et autres. Nous soutenons donc l’institution de l’autonomie de la Crimée, afin qu’elle soit une partie intégrante de l’Ukraine et garantisse à la fois les droits politiques des Tatars de Crimée et les droits culturels des minorités ethniques. Nous avons une base théorique pour la création d’une telle autonomie et clairement une position pro-ukrainienne des Tatars de Crimée. En ce qui concerne le soi-disant référendum, c’était une farce. N’y ont pas participé plus de 30% de la population de la Crimée. Ce pseudo-référendum a été organisé dans la ligne de mire des armes russes. Tôt ou tard, Kiev reprendra le plein contrôle du territoire de la Crimée.

Vous dites souvent vouloir une Ukraine indépendante et souveraine. Si demain vous arriviez au pouvoir, quelle serait votre stratégie en matière de politique étrangère ? Quelles alliances internationales devrait avoir l’Ukraine ? Dans une Ukraine indépendante et souveraine, dans laquelle vous seriez au pouvoir, pourrait-il y avoir une relation avec la Russie ?

Nous voyons différentes zones de consolidation et d’intégration de l’Europe centrale et orientale. En premier lieu, la création d’un axe de la Baltique à la mer Noire, avec la participation des Etats baltes, la Biélorussie, la Pologne et l’Ukraine. En second lieu, nous sommes intéressés à la consolidation des pays de la Mer Noire et du Caucase. À bien des égards, nous sommes prêts à penser d’une manière pragmatique à la recherche d’alliés géopolitiques, à partir de cette situation géopolitique spécifique. En ce qui concerne la Russie, la normalisation des relations avec ce pays ne sera possible que lorsqu’il se libérera de ses propres ambitions impérialistes.

Il y a quelques jours, par l’intermédiaire de son site officiel, le mouvement nationaliste ukrainien Pravyi Sektor a présenté sa recette pour l’avenir de la nation ukrainienne, qu’il a remis entre les mains de son chef charismatique Dmytro Yaroch.

Entretien réalisé par Alberto Palladino

Il Primato Nazionale, Kiev, le 13 mai 2014

Traduction française : Fortune

Commentaires

13 mai... Une éternité!! Il serait intéressant de savoir ce qu'il pense de Porochenko.

Il peut dire ce qu'il veut, c'est parfois intéressant voir juste, mais les résultats de la présidentielle furent un désavoeu cinglant pour lui.

Cependant, il a raison sur point, l'hystérie russe sur la question du Praviy Sektor ne fait que le renforcer, surtout en ce moment. À croire que ce groupuscule dont le chef culmine à 2% aux élections menace l'équilibre du monde.

Écrit par : tarkan | 05/07/2014

Je ne sais pas ce que pense Yaroch de Porochenko (pas beaucoup de bien, à mon avis, et cependant moins de mal que de Ianoukovitch, je suppose, et à juste raison), mais en tout cas il estime clairement que la révolution nationale ukrainienne est loin d'être terminée :

http://pravyysektor.info/news/zvernennya-dmytra-yarosha-z-nahody-richnytsi-30-chervnya/

http://translate.google.fr/translate?hl=fr&sl=uk&u=http://pravyysektor.info/news/zvernennya-dmytra-yarosha-z-nahody-richnytsi-30-chervnya/&prev=/search%3Fq%3D30%2B%25D1%2587%25D0%25B5%25D1%2580%25D0%25B2%25D0%25BD%25D1%258F%2B1941%2B%25D1%2580%25D0%25BE%25D0%25BA%25D1%2583%2B%25D0%259E%25D1%2580%25D0%25B3%25D0%25B0%25D0%25BD%25D1%2596%25D0%25B7%25D0%25B0%25D1%2586%25D1%2596%25D1%258F%2B%25D0%25A3%25D0%25BA%25D1%2580%25D0%25B0%25D1%2597%25D0%25BD%25D1%2581%25D1%258C%25D0%25BA%25D0%25B8%25D1%2585%2B%25D0%259D%25D0%25B0%25D1%2586%25D1%2596%25D0%25BE%25D0%25BD%25D0%25B0%25D0%25BB%25D1%2596%25D1%2581%25D1%2582%25D1%2596%25D0%25B2%2B%25D0%25BF%25D1%2596%25D0%25B4%2B%25D0%25BF%25D1%2580%25D0%25BE%25D0%25B2%25D0%25BE%25D0%25B4%25D0%25BE%25D0%25BC%2B%25D0%25A1%25D1%2582%25D0%25B5%25D0%25BF%25D0%25B0%25D0%25BD%25D0%25B0%2B%25D0%2591%25D0%25B0%25D0%25BD%25D0%25B4%25D0%25B5%25D1%2580%25D0%25B8%2B%25D0%25BF%25D1%2580%25D0%25BE%25D0%25B3%25D0%25BE%25D0%25BB%25D0%25BE%25D1%2581%25D0%25B8%25D0%25BB%25D0%25B0%2B%25D0%25B2%25D1%2596%25D0%25B4%25D0%25BD%25D0%25BE%25D0%25B2%25D0%25BB%25D0%25B5%25D0%25BD%25D0%25BD%25D1%258F%2B%25D1%2583%25D0%25BA%25D1%2580%25D0%25B0%25D1%2597%25D0%25BD%25D1%2581%25D1%258C%25D0%25BA%25D0%25BE%25D1%2597%2B%25D0%25B4%25D0%25B5%25D1%2580%25D0%25B6%25D0%25B0%25D0%25B2%25D0%25BD%25D0%25BE%25D1%2581%25D1%2582%25D1%2596.%26client%3Dubuntu%26hs%3DifD%26channel%3Dfs

Quant au désaveu électoral du 25 mai, je ne suis pas sûr.

A mon avis, Yaroch n'a simplement pas été jugé, vu son peu de notoriété et son absence (volontaire) de campagne électorale, comme ayant la stature d'un présidentiable. Dans le contexte désastreux de l'économie ukrainienne et de la menace étrangère, les électeurs ont choisi un homme de compromis et de consensus, dans le souci de parer au plus pressé. Il n'est pas dit que Porochenko les satisfasse sur le moyen terme.

Écrit par : Boreas | 05/07/2014

un homme intéressant décidément. merci

Écrit par : hoplite | 06/07/2014

Soyons clair, les électeurs de Svoboda de 2012 ne se sont pas évaporés entre ces deux années qui se sont écoulés. Mieux même, je pense que la majorité des Ukrainiens sont acquis à la cause des nationalistes Ukrainiens (merci Poutine, ton impérialisme a permis de ressouder ce peuple) , mais le principal problème, c'est ce qui va se passer après la guerre de reconquête (je n'emploi pas le terme de guerre civile car la plupart des pro-russes ne sont pas des locaux). En effet, les nationalistes iront-ils au bout de leurs idées, auront-ils le courage d'imposer leurs idées, par la force s'il le faut ? Comment se comporteront-ils lorsque Poroshenko tentera d'intégrer l'Ukraine à l'UE ? J'ai bien peur que comme en France en 2013 , le mouvement nationaliste ne se tasse et que ce soit les mondialistes qui récupèrent les gains de leurs efforts.
Attendons de voir, mais j'estime les chances des natios ukrainiens à 30% de pouvoir s'imposer en Ukraine.

Écrit par : yann | 06/07/2014

J'ai traduit le discours de M. Yaroch. Regardez ci-dessous :

"Le 30 juin 1941, l’Organisation des nationalistes ukrainiens dirigée par Stepan Bandera a déclaré la restauration de l’Etat ukrainien. Les chances étaient minimes que cette « aventure » se termine par l’indépendance réelle. Cependant, les nationalistes-révolutionnaires ont fait ce qu’ils devaient faire, et ont fait une bonne chose. L’acte du 30 juin a révélé les vraies intentions des occupants nazis, a montré l’intransigeance des nationalistes ukrainiens, est devenu l’impulsion du début de la guerre insurrectionnelle à grande échelle, au début contre les allemands, et puis contre les occupants russes. Dans le sang versé par l’OUN-UPA nous – la génération actuelle de nationalistes – sommes nés.

Aujourd’hui, nous continuons à marcher sur le chemin de nos prédécesseurs, nous continuons à nous battre pour l’Etat ukrainien indépendant et uni – principal instrument pour la réalisation des intérêts de la nation ukrainienne et sa mission historique, comme facteur important de la restructuration de l’espace géopolitique eurasien et tout le monde, comme facteur de la reprise de la civilisation occidentale. Comme auparavant, nous devons nous battre sur plusieurs fronts…

L’une des technologies les plus insidieuses, utilisées aujourd’hui contre la nation ukrainienne, est de convaincre les Ukrainiens que le Maïdan n’était qu’une lutte pour « l’eurointégration ». Maintenant que l’Accord d’association est signé, notre but est atteint, l’horizon révolutionnaire disparait. Tout cela n’est pas vrai ! La révolution nationale n’a pas gagné, elle a seulement été suspendue par l’agression russe.

Je suis convaincu que la guerre défensive actuelle contre les mercenaires russes, malgré toute son importance, n’est qu’un instant tactique d’une stratégie du nationalisme ukrainien. Aujourd’hui, la plupart de société ukrainienne est unie autour de l’idée de la résistance à l’impérialisme russe, et je crois, qu’avec le temps elle va unir dans l’idée d’un véritable changement révolutionnaire, non illusoire. Aujourd’hui, les nationalistes ukrainiens sont à l’avant du front, au bord de la lutte contre les occupants – ils défendent la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine. Et déjà demain, ils acquerront de l’expérience et de la crédibilité auprès du public, participeront à la lutte pour la transformation de cet Etat oligarchique pour un vrai Etat national, qui servira les intérêts de la nation ukrainienne, et donc – fournira la liberté, la justice et le bien-être à chacun de ses citoyens.

Le nationalisme ukrainien est une idéologie non seulement de la défense, mais de l’offensive. La révolution nationale ukrainienne gagnera ! L’USSD deviendra une réalité ! Cette réalité se forge aujourd’hui !

Leader du « Secteur droit », Chef du Stepan Bandera VO « Tryzoub », Dmytro Yaroch"

Écrit par : denys | 06/07/2014

Denys, merci infiniment !

J'en déduis que je peux reprendre votre traduction sous forme de billet. Ce que je vais m'empresser de faire.

Si un jour nous nous rencontrons, c'est moi qui invite ! :-)

Écrit par : Boreas | 06/07/2014

Ben bien sûr vous pouvez utiliser cette traduction :) C'est pour cela je l'ai faite.

Écrit par : Denys | 06/07/2014

Les commentaires sont fermés.