Honneur aux soldats français de 1940 (08/05/2012)
Le char B1 bis « Eure » du capitaine Billotte, à Stonne (Ardennes) le 16 mai 1940
Le 8 mai 1945 est une date qui marque essentiellement la victoire de l'industrie militaire américaine et des soldats soviétiques.
Ce n'est pas une victoire de la France ni de l'Europe et le général de Gaulle, fervent européaniste partisan de la réconciliation avec l'Allemagne, l'avait bien compris, lui qui, en 1959, avait supprimé par décret le caractère férié de ce jour, institué en 1953 sous la présidence de Vincent Auriol, anti-allemand notoire.
Depuis 1981 et Mitterrand en pleine débauche de gages idéologiques à destination des obsessionnels « anti-fascistes », le 8 mai est officiellement redevenu, sans qu'aucun président ne s'y oppose plus, cette commémoration d'un malentendu qui, sous prétexte d'anti-nazisme, conduit le quidam à voir une libération dans la soumission de la France à l'ordre européiste-américaniste issu de la deuxième guerre mondiale et, pire, lui fait croire qu'il existerait une quelconque solidarité, une quelconque communauté d'intérêts et de destins entre son peuple et les anglo-saxons.
Se souvient-on aujourd'hui que de Gaulle, encore lui, avait refusé par deux fois l'entrée dans la CEE au Royaume-Uni, qu'il appelait le « cheval de Troie des Américains » ? Plus clairvoyant que nombre de politiques français depuis des siècles, il avait bien identifié l'ennemi.
A supposer qu'il y ait quelque chose à fêter dans les sombres périodes de la deuxième guerre mondiale et de ses suites géopolitiques, je propose de ne retenir, en ce trompeur 8 mai, que le courage et l'honneur de nos soldats de 1940, niés depuis soixante ans au moins par une intense propagande pseudo-historique, relayée par le tabou de la honte, par une autoflagellation se voulant comique pour dédramatiser (par exemple, la série cinématographique « La septième compagnie » ne retenant que la débâcle de juin...) ; le tout, bien utile à tous les détracteurs de la France pour nous persuader que non contents de s'être jetés comme un seul homme dans la collaboration, les Français se seraient antérieurement ridiculisés au combat, voire se seraient massivement rendus sans avoir osé s'opposer à l'invasion allemande.
J'ai personnellement connu un ancien soldat de 1940 - il s'appelait Eugène et est mort récemment - et, croyez-moi, c'était un homme et il s'est battu courageusement. Je ne donnerai aucun détail, car ses confidences n'étaient pas destinées à une publication, à laquelle sa grande modestie se serait d'ailleurs opposée.
Pour preuve de la valeur au combat des Français de l'époque, il suffit de s'intéresser à deux épisodes trop méconnus de la résistance à l'invasion : la bataille de Hannut (12 au 14 mai 1940), premier combat frontal de chars de l'Histoire et victoire française, et la bataille de Stonne (15 au 25 mai 1940), qui fit dire à un historien allemand : « Les soldats de la Wehrmacht ont toujours comparé l'enfer de Stonne en 1940 à l'enfer de Verdun en 1916 ».
Dans les deux cas, infériorité numérique française et pourtant...
A ce sujet, ce n'est pas l'humilité des anciens qui nous en dira beaucoup. Il faut lire entre les lignes et deviner :
Ces braves méritent notre hommage et ne sont aucunement responsables de la défaite, dont les causes principales sont : la médiocrité de la classe politique et de l'état-major, comme l'obsolescence globale de la doctrine militaire française de l'époque, se traduisant notamment par une insuffisance d'organisation et d'équipement du renseignement, des transmissions et de l'aviation.
Il est facile de faire un parallèle inquiétant avec la partitocratie sclérosée et l'armée de raccroc qui sont les nôtres aujourd'hui.
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P.S. : J'ajoute cette vidéo magnifique, racontant l'héroïque bataille de Dunkerque, considérée par les généraux allemands comme une défaite et par les Anglais comme une victoire, avant que les journaux et la propagande de guerre de ces derniers n'inversent l'interprétation pour les besoins de leur cause, à leur manière toujours traîtresse ; tout cela, grâce à la valeur militaire des Français (« la même fougue que ceux de Verdun en 1916 » - Général Georg Von Küchler).
Vidéo, dont le lien m'a été donné par @Imperator. Merci à lui.
18:33 Écrit par Boreas | Lien permanent | Tags : commémoration, 8 mai 1945, victoire, etats-unis, urss, france, défaite, mai 1940, juin 1940, europe, de gaulle, allemagne, soumission, anglo-saxons, courage, honneur, soldats français, combat, bataille de hannut, bataille de stonne | Facebook | | Imprimer | |
Commentaires
Oui mais non. Certes en 40 l'Armée de l'Air a réussi des exploits, certes Dunkerque fut un sacrifice au profit des anglais, qui permit aussi la légitimité de De Gaulle à Londres, certes le nombre de victimes francaises sur le conflit (de mémoire plus de 600.000) fut supérieur au total de pertes humaines US.
Mais Juin 40 c'est aussi le choc des congés payés à l'ombre de la ligne Maginot contre la rage du traité de Versailles et de la famine, la deliquescence du farniente aux lauriers fanés contre un violent appétit de vengeance et domination. Le courage mérite respect, mais l'incontestable défaite de 40 reste jusqu'à aujourd'hui comme un viol refoulé, terriblement douloureux et origine à mon avis de la perte du cap francais depuis. Avoir réussi à négocier une place au conseil de sécurité de l'ONU comme vainqueur reste un exploit de poker, pour le reste: regard vers le bas.
Écrit par : Bernardo | 08/05/2012
"pour le reste: regard vers le bas."
Ce qui veut dire?....
Écrit par : Imperator. | 08/05/2012
Z a raison, je pense, sur la dimension historique et collective de cette défaite.
Si les allemands ont attendu plus d'un siécle pour oublier Iena, il faut un autre conflit , victorieux, pour laver 40.
On en prend pas le chemin...
Écrit par : Three piglets | 08/05/2012
La défaite reste la défaite, je ne dis pas le contraire. Et en général, le vainqueur est effectivement le plus motivé.
Cela dit, il ne faudrait surtout pas qu'un éventuel esprit de revanche nous jette à nouveau un jour contre l'Allemagne. Ce serait vraiment la plus épouvantable erreur possible.
Notre véritable ennemi, nous le connaissons.
Écrit par : Boreas | 08/05/2012
Absolument. Il faut rendre hommage à nos soldats qui se sont vaillement battus. Je recommande chaudement les ouvrages de D Lormier.
J'ai une pensée pour mes grand-pères, notamment pour mon grand-père paternel.
En complément de votre article: http://www.youtube.com/watch?v=XaR1BH-yuIA&list=UURmMpX_s4NbCkTJ_rKUS_uA&index=1&feature=plcp
Écrit par : Imperator. | 08/05/2012
Merci, Imperator.
Votre vidéo, que je reprends en conclusion de ce billet, comble un vide que je ne parvenais pas à remplir, malgré mes recherches. Aucun des films que j'avais trouvés sur la bataille de Dunkerque ne me plaisait, car la vérité est peu connue et donc peu illustrée.
Écrit par : Boreas | 09/05/2012
Très belle photo du B1bis du capitaine Billotte.
Je rêverais par exemple d'un beau téléfilm racontant ce combat où déboulant à Stonne avec son char, il détruisit toute une colonne allemande, dont plus de 13 panzer et cela, après que son B1 eut été touché à 140 reprises !!!
http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Stonne
Oui, ce serait formidable un film sur cet épisode glorieux sans les poncifs flagellatoires habituels, mais faut pas rêver !
Écrit par : UnOurs | 08/05/2012
Notre véritable défaite n'est pas mai 40, c'est 1815 avec Napoléon face à qui tu sais.
Écrit par : Three piglets | 08/05/2012
Intérêt et émotion à voir la photo du char du capitaine P. Billotte que j´ai bien connu sur le tard de sa vie. Au cours de cette bataille il commandait cette compagnie de char mais savez vous que son père, général, mourut sur son propre char durant cette "bataille de France", la tête atteinte par un éclat allemand ? Le capitaine Billotte rejoint De Gaulle à Londres et devint plus tard son Ministre de la Défense lors de la mandature De Gaulle entre 1959 et 1968. Il proçéda avec Messmer aux essais nucléaires dans le Pacifique. Bien longtemps après, je me trouvai avec lui et Jacques Soustelle en Amérique Latine au moment qui préçéda le conflit des Malouines et les 2 hommes qui se trouvaient au Paraguay pour une visite au général Stroessner (vieil ami de Soustelle...) furent priés d´aller voir le général Galtierri, Ct en chef de la Junte Argentine peu avant que n´éclatât le conflit avec le Royaume Uni. Ils rencontrèrent non seulement Galtierri ( bellâtre asse fât ) mais aussi l´amiral Masera et le général Lami Dozo ( Ct de la Force Aérienne ) et à leur retour à Paris rendirent compte à Mitterrand...Notre ambassadeur à Buenos Ayres ( Bernard Destremeau ) était aux 400 coups...Le reste appartient aux archives de l´Armée et je ne sais si c´est "déclassifié" ...Je ne crois pas. Mais c´est un témoin direct qui vous l´assure içi.
Écrit par : Wottan | 09/05/2012
Wottan
Merci de votre témoignage.
Concernant le père du capitaine Pierre Billotte, oui, j'avais vu sa fiche wikipédia. La cause donnée à sa mort n'y est pas celle que vous évoquez, mais un accident de voiture :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gaston_Billotte
Ce, notamment, sur la foi de ce témoignage :
http://home.nordnet.fr/~rgombert/Meteren/III.10%20Val.Buttin.htm (voir la date du 23 mai 1940 et la note 27)
Écrit par : Boreas | 09/05/2012
Oui j´ai vérifié...cette mort est un peu moins glorieuse...Ma confusion est extrême car cette histoire m´avait été contée par la (2 ème ) épouse de P. Billotte, américaine richissime assez excentrique et que le Général ( fort affairé par le beau sexe en dépit de ses allègres 70 ans...) me confiait volontiers pour d´interminables tournois de bridge entre Deauville et le Cap Martin...Le Général occupait alors sa retraite ( nous sommes sous la 1ère mandature Mitterrand...) comme Président du Haut Comité Français de Défense Civile ( Vice Pts Maurice Schuman et J.Soustelle ) dont j´étais l´indolent "secrétaire général"...Un de ces "bidules" que l´ingénieux Mitterrand avait mis sur pied et doté de fonds ma foi généreux et destiné à "apprivoiser" quelques Gaullistes historiques qui savaient beaucoup de choses un peu gênantes sur lui et qui trouvaient que la générosité présidentielle comme adjuvant de leurs retraites (sauf Schuman alors Sénateur...) valait bien qu´ils simulassent l´oubli... Étant né 10 ans après le début de la guerre, j`avais pris la fanfaronnade de la Générale pour argent comptant...La pauvre avait l´excuse d´un faible certain et même immodéré pour le gin tonic et moi celle d´une respectueuse ingénuité et l´habitude de claquer les talons.
Écrit par : Wottan | 09/05/2012
Merci pour ce beau rappel.
C'est toujours avec une grande tristesse que je pense à tous ces soldats qui se sont battus au cours des deux conflits mondiaux. C'était le meilleur de la vieille France... Ce qui est particulièrement tragique, c'est que tous ces sacrifices ont été inutiles, car la France n'était plus que le petit soldat de la perfide Albion.
Écrit par : JP | 09/05/2012
Inutile, non n'allons pas pas jusque là quand même! Par contre, les combattants de ces 2 guerres nous montre le savoir-faire et le courage légendaire du soldat français, craint et redouté de tous au fil des siècle.
Écrit par : Imperator. | 09/05/2012
Plutôt qu'"inutile", disons plutôt que tout cela s'est fait finalement au détriment de notre pays. Nous aurions pu nous réconcilier avec l'Allemagne grâce à Hanotaux et éviter cette terrible tragédie... Au lieu de ça, nous nous sommes alliés avec l'Angleterre ( la Russie a fait la même erreur ) et nous avons servi ses intérêts, au final. Oh, bien sûr, nous avons récupéré l'Alsace et la Moselle, mais à quel prix ! Quant à la deuxième guerre mondiale, il ne faut pas oublier le rôle de l'Angleterre qui nous a trahi à plusieurs reprises, par exemple en 1935 avec la signature du traité naval germano-britannique.
Écrit par : JP | 09/05/2012
Arrière grand père au Chemin des dames, deux grands pères sur le front en 40.
L'un deux a traversé la moitié de la France a vélo en mangeant des fraises pour surtout "ne pas etre prisonnier" et echapper aux allemands.
Avant que sa compagnie ne soit dispersée, il a du traverser un pont avec un officier francais qui leur barrait la route.
Il lui a mis son fusil sur le ventre et a forcé le passage...
L'officier etait de la 5eme colonne.
Ce qu'il m'a repeté surtout, souvent, c'est "on a ete vendus".
(Annecdotes inverifiables evidement. Sauf "on a ete vendus", auquel je crois profondement...)
Je crois que la defaite de 40 est en effet la mère de la flagellation et de la repentance francaise.
Écrit par : JÖ | 10/05/2012
J ais connu un vieux monsieur avec qui je ramassais des cerises. Il avait fuit vers l Algérie en passant par les geoles franquistes.
Il avait combattu en Italie. Il m a raconté que les Français apres la percé du Garigliano avait été bombardé par les ricains pour ne pas entré les premiers dans Rome.
Erreurs regrettable ont ils dit .....
Écrit par : libherT | 10/05/2012
Vous savez, Patton et Montgomerry se sont fait la course pour arriver a prendre des villes pendant la campagne d'Italie aussi.
(Bon peut etre pas au point de se bombarder...)
Écrit par : JÖ | 10/05/2012
'Les Allemands firent une première apparition vers 15 h. Deux engins blindés apparurent à l'extrémité de la route Paris Amiens et s'arrêtèrent à 800 m de nous. Je fis ouvrir le feu d'un canon de 47. Les deux engins effectuèrent alors une marche arrière rapide et disparurent derrière la crête.
Un peu plus tard, on vit arriver un car sur la route Paris-Beauvais. Le véhicule s'arrêta à proximité de la barricade. Les occupants se mirent debout et agitèrent des drapeaux blancs tandis qu'un clairon faisait entendre une série de coup de langue. On ne m'avait donné aucune consigne pour recevoir des parlementaires et dans ce cas le règlement est formel : toute tentative de conversation doit être reçue à coup de fusil. J'ordonnai donc l'ouverture du feu. Les hommes hésitèrent d'abord, un tel geste leur paraissant sacrilège ; puis devant un second ordre impératif, ils s'exécutèrent et une série de rafale se mirent à claquer. Je vis alors ce que je n'ai jamais eu l'occasion de contempler pendant cette campagne : Les Allemands se ruèrent hors du car et se débandèrent à toute vitesse le long des fossés de la route. Ils laissaient entre nos mains, outre le car dont les pneus étaient crevés, un casque, un fusil, des sacs, des équipements, etc..."
Notes de mon grand-père.
A noter que lui aussi est passé par les geôles franquistes, avant d'aller prendre en main une compagnie de tirailleurs tunisiens et de participer à la bataille d'Italie.
Drôle d'époque... Pour eux, c'étaient réellement l'apocalypse.
Écrit par : Sopotec | 13/05/2012
Merci pour ce "revers" de la médaille...
Écrit par : ikBarjot | 18/05/2012
Merci beaucoup. Je reçois internet depuis peu, moins de trois mois. J'ai appris (ou reçu confirmation) énormément sur la 2° GM. Je la vois différemment, surtout la période avant le 18 juin 1940. A travers les commentaires de tous les bords, et les cassettes, et les lectures, merci à tous de m'éclairer. Suis-je alors aussi naïf ? Vive la paix.
André Pinau. 23 mai 2012.
Écrit par : André Pinau | 23/05/2012
Désolé pour mon commentaire tardif.
Attention à ne pas virer d'un extrême à l'autre. Il y a en effet des Français qui se sont battus. Bien battus. Parfois jusqu'à la mort.
Dire que cette campagne était une rigolade c'est ignorer que les pertes journalières des Allemands ont été, comparativement à la durée de la bataille, supérieures à celle qu'ils ont connus en Normandie (où pourtant ils ont été encerclés et saigné à blanc dans la poche de Falaise), on peut faire la même comparaison entre les pertes Françaises en 1940 et celles des Alliés anglo-saxons en Normandie ou tout autre campagne qu'ils ont mené. Pour les Allemands, le front de l'est en 1941 n'est pas plus meurtrier de manière journalière que la bataille de France, il le deviendra seulement après des mois de combats.
Mais à bien y regarder, ceci semble dû à... une minorité de soldats. Oui, une minorité.
La 7e compagnie ne révèle pas un fait isolé exagéré. Au contraire, je trouve le film assez bien fait, même si c'est vrai qu'il ne va que dans un sens. Pour avoir beaucoup lu sur le passage de la Meuse par les Allemands le 13 mai 1940 (qui aboutira à la poche de Dunkerque), il y a eu énormément de fuyards au moment où les Allemands sont arrivés. Je pourrais donner de très nombreux exemples...
C'est particulièrement injuste envers ceux qui se sont battus. Ce qui est même incroyable, c'est que pas une fois au cours de mes lectures ou de mes rencontres, je n'ai entendu parler de défaillance telles de la part de coloniaux, de malgaches, de maghrébins ou de zouaves. Quand bien même leurs officiers français les abandonnait.
C'est une partie vraiment sinistre de notre histoire. Je n'ai pas vécu cette époque mais quelle drôle de sentiment elle me laisse quand je la regarde. Comment, après le sacrifice de leurs pères en 14-18, tant de nos soldats ont-ils pu jeter leurs armes si rapidement ?
Ce n'était pas une chose qui est apparue chez le soldat, on la retrouve chez les élus locaux (maires) qui ont tout fait pour laisser passer les Allemands et éviter ainsi tout combat (les fameuses villes ouvertes).
Oui, une majeure partie de la France ne voulait pas se battre. Ça m'est honnêtement incompréhensible, étant du nord de la France j'ai toujours entendu parler des atrocités allemandes de 14-18 sur les populations occupés (qui était en un sens pire que celle de 40-44 où les impitoyables exactions ont été très ciblées (juifs...)) ce qui a d'ailleurs provoqué un exode en 40 pour éviter de revivre ça. Comment ça se fait que les Français n'ont ils pas voulus défendre leur territoire face à un ennemi qui avait été si brutal envers la population occupée ?
Écrit par : Chevalier | 10/04/2013