La théorie du genre, c'est du pipeau... dixit Judith Butler (29/01/2014)
Avec un visage si masculin, quelques problèmes d'identité sexuelle n'ont rien d'étonnant... Elle me fait penser à Caroline Fourest, mais en plus fin.
« (...) Loin d’être une idéologie, les gender studies (études sur le genre) ne sont qu’une nébuleuse de recherches, menées depuis une trentaine d’années aux États-Unis. Y coexistent des sensibilités et des courants fort divers, des plus modérés jusqu’au radicalisme insensé de certains groupuscules lesbiens. Au départ, on était d’accord pour admettre que, dans la classification sexuée des êtres humains, des éléments culturels entraient en ligne de compte. C’est une évidence. On "apprend" ainsi à une fillette à devenir une femme, de même que l’on "prépare" un garçonnet à être un homme. Sauf exception, le culturel et le biologique combinent leurs effets, y compris parfois pour justifier une domination masculine. (...)
Hélas, certains courants extrémistes, menés voici 25 ans par la philosophe Judith Butler, avaient radicalisé leur position en soutenant que le "biologique" n’avait plus d’importance et que tout dépendait du "culturel" et du "politique". Il s’agissait de récuser ce que ces groupes considèrent comme une assignation à une sexualité donnée afin de combattre des dominations dont les femmes et les gays feraient les frais. Le livre de Judith Butler (Trouble dans le genre) incarnant ce courant minoritaire date de 1990. Vingt-trois ans plus tard, c’est à lui que les promoteurs français du "genre" se réfèrent sempiternellement. Faisant cela, ils mentent par omission. Gravement.
Tout à leur éloge de Judith Butler, ils se gardent bien de dire qu’entre-temps celle-ci a récusé les thèses radicales qu’elle formulait dans son premier livre, se reprochant d’avoir obéi à une phobie du corps. Elle a même fait preuve de courage en se moquant d’elle-même et en qualifiant ces premiers textes de "trop vite écrits". Butler ajoutait récemment : "Vous devez savoir qu’aux États-Unis, dans ma jeunesse, j’étais une gouine de bar qui passait ses journées à lire Hegel et ses soirées dans un bar gay, lesbien et drag-queen".
Aujourd’hui, elle a fait un pas de plus dans l’autocritique en dénonçant le "nationalisme gay", à la limite du racisme, qui polluerait selon elle la lutte occidentale contre l’homophobie. Or, rien de tout cela n’est jamais évoqué par les avocats français du "genre". Pas un mot. Je pense au sociologue Éric Fassin. Dans un livre d’entretiens avec (...) Véronique Margron (Homme, femme, quelle différence ? chez Salvator), il cite Judith Butler mais s’en tient obstinément au premier livre de cette dernière (dont il avait préfacé la traduction française) sans jamais mentionner le revirement de son auteur. (...) »
19:49 Écrit par Boreas | Lien permanent | Tags : théorie du genre, judith butler, inné, acquis, classification sexuée, homme, femme, école, culturel, politique, biologique, revirement, récusation, lobby, gay, lgbt | Facebook | | Imprimer | |
Commentaires
« Si l’universalisme de la gauche est d’abord l’héritier de celui de la philosophie des Lumières, on ne saurait pour autant oublier ses racines chrétiennes et, notamment, son origine Paulinienne (c’est un point sur lequel Alain Badiou a eu le grand mérite d’exister). ¨Pour Saint Paul, en effet, il n’existera plus, dans le Royaume de Dieu, « ni Juif ni Grec, ni esclave ni maître, ni mâle ni femelle » (Epitre aux Galates, 3-28) parce que alors tous ne feront plus qu’ « un dans le Christ ». Dans cette conception désincarnée (ou transgenre) de l’universel (que l’on retrouverait, de nos jours, aussi bien au principe de la lutte citoyenne « contre toutes les formes de discrimination » qu’à celui de ces royaumes de Dieu modernes que sont la « communauté européenne » ou le Marché mondial), toute détermination particulière –c’est-à-dire tout agencement symbolique concret supposé enfermer un sujet (qu’il soit individuel ou collectif) dans les limites d’un héritage historique ou naturel donné- doit être pensé comme un obstacle majeur à l’avènement d’un ordre juste et, par conséquent, comme une configuration politiquement incorrecte qu’il est indispensable d’éradiquer au plus vite.
Tel est bien, en fin de compte, le sens ultime de la croisade perpétuelle de la gauche et de l’extrême –gauche contemporaines contre tout ce qui pourrait impliquer une forme quelconque de filiation ou d’identité individuelle et collective –y compris sur le plan anatomique et sexuel (Judith Butler –figure emblématique de la gauche américaine moderne- tenant ainsi la drag queen pour le seul sujet politique révolutionnaire capable de remplacer efficacement l’ « ancien » prolétaire de la doctrine marxiste). Si donc la loi du progrès est celle qui doit inexorablement conduire des étouffantes « sociétés closes » à la merveilleuse « société ouverte » -qui oblige, en d’autres termes, l’ensemble des civilisations existantes (du monde islamique aux tribus indiennes d’Amazonie) à renoncer peu à peu à toutes ces limitations « arbitraires » qui fondaient leur identité contingente pour se dissoudre triomphalement dans l’unité post-historique –au sens ou l’entendait Fukuyama- d’une société mondiale uniformisée (unité dont le moteur ne saurait évidement être que le développement coordonné du libre-échange, des « droits de l’homme » et de la culture mainstream)- on comprend alors ce qui fait la cohérence philosophique de la gauche moderne. Pour cette dernière, en effet, c’est forcément une seule et même chose que de refuser le sombre héritage du passé (qui ne saurait appeler, par principe, que des attitudes de « repentance »), de combattre tous les symptômes de la fièvre « identitaire » (c’est-à-dire, en d’autres termes, tous les signes d’une vie collective enracinée dans une culture particulière) et de célébrer à l’infini la transgression de toutes le limites morales et culturelles léguées par les générations antérieures (le règne accompli de l’universel libéral-paulinien devant coïncider, par définition, avec celui de l’indifférenciation et de l’illimitation absolues).
Aux yeux de l’intellectuel de gauche contemporain, il va nécessairement de soi que le respect du passé, la défense de particularismes culturels et le sens des limites ne sont que les trois têtes, également monstrueuses, de la même hydre réactionnaire. »
JC Michéa, Le complexe d’Orphée, 2011.
Écrit par : hoplite | 29/01/2014
@Boreas Très juste votre remarque sur la ressemblance avec C.Fourest : capillairement parlant , la plupart des spécialistes des "gender studies" sont adeptes du carré droit .
@Hoplite
On en revient toujours à Michéa ;-)
Écrit par : alain21 | 29/01/2014
A propos de Michéa , France Culture vient de consacrer une heure aux "nouveaux réactionnaires" dont il serait l'idéologue .
http://www.franceculture.fr/emission-sur-les-docks-%C2%AB-nouveaux-reactionnaires-la-modernite-en-question-%C2%BB-2014-01-30
Les "nouveaux réactionnaires" , ce sont pour qui "l'idée de Progrès ne fait plus recette" comme le définit Stéphane François ( historien des idées , c'est quoi au fait historien des idées) .
Avec la présentation de quelques spécimens de ces nouveaux réactionnaires ( un couple de parents de famille nombreuse très très LMPT , Coralie Delaume ex chevenementiste pro Dupont Aignan qui écrit (écrivait ) un blog repris par Marianne2 , et un autre intervenant François Depierre (?) )
Écrit par : alain21 | 31/01/2014
J'ai récupéré le nom du 3ème témoin : il s'agit de François Belkaer ( Belquère ? ) qui intervient auprès des SDF tout en militant à l'Action Française. Il vote parfois FN pour faire imploser le système (à 47 mn) .
Son intervention ( à 33 mn ) le présente comme pessimiste envers les grandes catégories politiques ( droite ; gauche....) mais foncièrement optimiste sur le Peuple (qui s'est exprimé à travers différents mouvements : bonnets rouges ...).
En conclusion de mes 2 commentaires de ce matin ( Boreas , veuillez m'excuser) , je dirai que je crois que je fais aussi partie de la secte de "nouveaux réactionnaires" telle que l'a défini France Culture: je me retrouve bien des fois dans les propos des 3 témoins , à part le discours sur le FN , dynamite du système.
Le FN n'est pas (plus ?) anti système , il est la figure la plus musclée (autoritaire ?) du système .
Écrit par : alain21 | 31/01/2014
@ Alain21
Le FN reste anti-système, mais je pense qu'il convoite le pouvoir avec une stratégie réaliste, qui est d'utiliser les outils politiques disponibles, ce qui l'oblige à délayer quelque peu son discours.
Avec deux députés à l'AN, on voit bien qu'ils partent de très loin, or MLP vise le pouvoir, là où son père le caressait à peine...
Vous ne pouvez pas avancer sans tenir compte de votre environnement. Vous ne pouvez pas traverser la dense jungle amazonienne en jeep juste parce que vous l'avez décidé: il faut s'adapter au contexte. C'est ce que fait le FN, parfois même trop, mais c'est le prix à payer.
Écrit par : Kris | 04/02/2014